Résumé

Cet article vise le cheptel bovin laitier chez les éleveurs adhérents au programme de contrôle laitier mené par l’Office d’Élevage et des Pâturages (OEP). L’objectif de cette étude est d’évaluer les performances laitières (Quantification et composition chimique). Les données recueillies de 2006 à 2014 sur les caractères de production (neuf troupeaux; n = 264 lactations) des vaches laitières Frisonne Holstein (FH) élevées à Monastir (zone côtière semi-aride en Tunisie) ont été utilisées pour déterminer les performances laitières. Le fichier est élaboré à partir des données relatives de 119 vaches/génisses. Les données ont été analysées en utilisant le modèle linéaire fixe. Les résultats montrent que les performances laitières sont relativement faibles, avec de grandes variations entre individus. La moyenne de la production laitière totale est de 4963 ± 1520 kg, soit une production journalière moyenne de 14 ± 4 kg. Les taux butyreux et protéique moyens (%) étaient, respectivement, 3,64 ± 0,46 and 2,94 ± 0,26. Le numéro et la durée de lactation étaient les principales sources de variation affectant les performances laitières. L’année de vêlage a eu un effet significatif sur la composition chimique du lait. Cela confirme l’influence des conditions environnementales sur les constituants du lait. L’amélioration du niveau de la nutrition ainsi que la gestion du troupeau est nécessaire pour une production laitière optimale et une composition chimique riche.


Mots clés: Vache, production laitière, composition chimique, variation, hors sol, Tunisie. 

INTRODUCTION

En Tunisie, l’élevage bovin laitier constitue l’un des piliers de l’économie agricole et nationale. Il est classé parmi les secteurs prioritaires du fait qu’il génère un produit stratégique qui est le lait (GIVLAIT, 2014). À cet égard, suite à la demande croissante et continue des produits laitiers, l’État a encouragé l’investissement dans l’élevage bovin laitier notamment depuis les années 90 (M’Sadak et al., 2014). Par conséquent, une autosuffisance fragile est atteinte depuis 1999 avec un accroissement continu de la production (Bousselmi et al., 2010; Hammami et al., 2013). Bien que le potentiel du lait collecté soit généralement important, grâce aux efforts déployés par les pouvoirs publics surtout en matière d’importation des génisses de race laitière améliorée et d’encouragement à la collecte, la durabilité de l’élevage bovin laitier est de plus en plus mise en cause (Ben Salem et al., 2007). En fait, les éleveurs et les industriels se trouvent souvent confrontés à des défaillances au niveau de la qualité physico-chimique, parmi lesquelles la chute de deux taux constituants essentiels du lait cru (Araba, 2006). Comme la production laitière s’est développée dans les régions côtières du Sahel et de Sfax, tout en créant des bassins laitiers importants contribuant pour la moitié au total du lait collecté sur le territoire national (Nassef, 2001), le présent travail a été mené chez des élevages bovins laitiers dans le Gouvernorat de Monastir, région côtière du Sahel. En général, La production de lait est influencée par le potentiel génétique de l’animal et les facteurs non génétiques (Albarrán-Portillo et Pollott, 2011). D’où, la connaissance de ces facteurs s’avère essentielle pour une gestion efficace et une estimation précise des valeurs d’élevage (Nyamushamba et al., 2013; Nyamushamba et al., 2014). Cette étude a été menée, d’une part, pour évaluer la variabilité des performances quantitatives (production laitière totale et journalière, les quantités des matières grasses et protéiques) et des performances qualitatives (taux butyreux et taux protéique) et d’autre part, pour étudier les facteurs qui les affectent afin de servir de résultats pour l’amélioration de la gestion des troupeaux bovins conduits hors sol.

MATÉRIEL ET MÉTHODES 

Présentation de la zone d’étude

Le Gouvernorat de Monastir bénéficie d’une position centrale privilégiée au sein de la grande région du Sahel Tunisien (Figure 1). Le climat est de type méditerranéen. Monastir appartient à l’étage bioclimatique semi-aride. Cette zone se distingue par un tissu économique varié et scindé sur l’industrie, les activités agricoles, le tourisme et les services. L’agriculture repose essentiellement sur l’oléiculture, l’horticulture, la production animale et la pêche. Bien que l’élevage soit une spéculation récemment intégrée dans le Sahel Tunisien, il est rapidement développé. Par conséquent, une richesse et une diversité animales sont ainsi observées. L’élevage bovin laitier hors sol est bien développé, dans les régions littorales, depuis plus de vingt ans sans ou avec de faibles ressources fourragères produites localement. L’alimentation des animaux est le plus souvent achetée de l’extérieur (Hammami et al., 2013). En fait, environ 60% des fourrages grossiers sont apportés du Nord Tunisien. Ce système répandu se distingue par une forte utilisation des aliments concentrés, de son de blé, d’orge et des sous-produits agricoles (OEP, 2014).

Figure 1: Carte de localisation géographique de la région d’étude

Choix des éleveurs

L’étude a été conduite sur un échantillon de 9 petits à moyens élevages bovins laitiers adhérant au contrôle laitier de type AT6 (totalisant 119 vaches Frisonne Holstein en lactation et 264 lactations exploitées), menés en système hors sol dans le Sahel, zone côtière de la Tunisie Centrale.

Analyse et traitement des données

Les paramètres de production laitière des vaches ont été recensés de 2006 à 2014. Les données collectées à partir des fiches individuelles des vaches enregistrées après la consultation des fichiers de base de l’application d’amélioration génétique, ont concerné les quantités totales du lait par lactation (QLT), la durée de lactation, les quantités totales des Matières Grasses (QMG) et des Matières Protéiques (QMP) et les taux correspondants (TB et TP). Au total, 264 lactations ont été analysées. On a aussi procédé à l’estimation de la production laitière journalière (Lj), à partir de la durée de lactation et de la quantité totale du lait par lactation. L’analyse des données a été exécutée avec la procédure GLM du logiciel Statistical Analysis System (SAS, version 9.13). Elle a porté, dans une première étape, sur le calcul des moyennes et des fréquences, et dans une deuxième étape sur l’analyse de la variance pour identifier les principales sources de variation des paramètres de production laitière étudiés. Pour se faire, on a utilisé le modèle linéaire fixe suivant:

Yijklmn= µ + Elevi + Svj + Avk + Nll+ Cdlm+ (Avi*Svj) + eijklmn

Avec:

Yijklmn: performances lors de la nème lactation (QLT, Lj, QMG, QMP, TB et TP)

µ: moyenne générale

Elevi: effet du ième éleveur (i = 9 niveaux)

Svj: effet de la jème saison de vêlage (j = 2 niveaux)

Avk: effet de la kème année de vêlage (k = 6 niveaux)

Nll: effet de la lème lactation (l = 6 niveaux)

Cdlm : effet de la mème classe de lactation (m = 5 niveaux)

Avi * Sj : effet de l’interaction de l’année de vêlage et de la saison de vêlage

eijklmn : erreur résiduelle

Par la suite, la comparaison des moyennes des performances de production étudiées, en fonction des différentes sources de variation, est effectuée par le biais du test Duncan au seuil de 5%.

RÉSULTATS ET DISCUSSION 

Caractérisation quantitative des performances laitières

Paramètres laitiers quantitatifs

La production laitière d’une vache évolue d’un jour à l’autre aussi bien en quantité qu’en composition, déterminée par le TB et le TP (Boujenane, 2010). La quantité du lait produite par lactation varie de 3443 à 6483 kg avec une moyenne par lactation de 4963 kg, durant 363 jours, soit une quantité journalière moyenne de 14 ± 4 kg. Cette dernière est amplement inférieure à celle annoncée pour la race Prim’Holstein, en France, qui est en moyenne de 28 litres de lait par jour durant 10 mois.

La production laitière moyenne est supérieure à celle rapportée par Hammami et al., (2013), évaluée à 4456 kg. Alors qu’elle est inférieure aux résultats trouvés dans des conditions tunisiennes différentes, par Ben Salem et al., (2007), Ajili et al., (2007), Garrouri (2008), Hammami et al., (2013) et Bouraoui et al., (2013) qui sont, respectivement, de 5900, 5905, 5517, 5441 et 5445 kg. De tels résultats sont loin de la quantité de lait par lactation de référence enregistrée en France chez la race Holstein qui était de 9155 kg (Dejardin, 2003). Chaque vache de l’échantillon produit en moyenne 179 kg ± 60 de MG par lactation. Cette moyenne est inférieure à la quantité des MG par lactation de référence des vaches Holstein, estimée à 228,4 kg et à la moyenne rapportée par Ajili et al., (2007) qui était de 180,2 ± 75,9 kg. La quantité des MP est en moyenne de 147 ± 51 kg. Elle est inférieure à la valeur avancée par le dernier auteur et estimée à 167,8 ± 70,1 kg. Ces faibles performances pourraient être expliquées par le problème d’adaptation aux conditions climatiques contrastées et les disponibilités alimentaires limitées sur les plans quantitatif et qualitatif en Tunisie. En conséquence, les vaches importées ne peuvent pas extérioriser leur potentiel génétique. En fait, le rendement laitier d’un élevage bovin est le résultat de la combinaison du génotype et des facteurs non génétiques (Çilek, 2009).

Effet de la durée de lactation sur les paramètres laitiers quantitatifs

La répartition des vaches selon la durée de lactation a révélé qu’environ 27% ont une durée de lactation inférieure à 300 jours, environ 46% ont une durée longue (>350 jours) et seulement 27% ont une durée plus ou moins acceptable (entre 300 et 350 jours) dans les conditions Tunisiennes.

La production moyenne totale est de 4067 kg, soit 14,9 kg/jour (Tableau 1) pour les vaches avec des lactations courtes (<300 j). Elle est de 4541 kg, soit 14,1 kg /jour pour les vaches présentant des durées de lactation acceptables. En revanche, pour les vaches avec des lactations longues, la production laitière varie de 5281 kg à 6410 kg avec une production journalière variant de 12,5 à 14 kg.

Tableau 1: Évolution des quantités totale et journalière du lait en fonction de la durée de lactation

Durée de lactation QLT (kg) Lj (kg)

< à 300 j 4067d 14,9a

300 ≤ dl < 349 j 4541c 14,1ab

350 ≤ dl < 399 j 5281b 14,0ab

400 ≤ dl < 449 j 5429b 12,9bc

dl ≥ 450 j 6410a 12,5c

Les valeurs suivies de la même lettre ne présentent pas de différences significatives.

Les valeurs suivies de lettres différentes sont significativement différentes.

On a constaté que l’allongement de la durée de lactation a affecté à la fois la production totale et la production journalière (Tableau 1). En effet, la production journalière la plus élevée correspond à la plus courte durée et inversement. Ces résultats sont en accord avec ceux d’une étude éthiopienne (Nyamushamba, 2014). Alors qu’une étude israélienne (Arabel et al., 2000) a révélé que la production laitière annuelle, en prenant en compte la proportion élevée de jours productifs avec les lactations longues, est très légèrement inférieure pour les lactations longues comparativement aux normales. La majorité des vaches de l’échantillon sont des primipares. Or, chez ces vaches, qui sont en début de carrière et qui présentent des lactations à persistance plus soutenue (Sraïri et al., 2008), la production du lait est significativement plus élevée que chez les vaches avec des lactations normales (Arabel et al., 2000). Cette situation pourrait expliquer l’accroissement de la production laitière avec la prolongation de la durée de lactation. D’où, pour les primipares, il est préconisé d’avoir des lactations longues en retardant la mise en reproduction exclusivement pour cette catégorie sans généralisation de cette opération au reste du troupeau. Par contre, les courtes lactations suite à une mise en reproduction précoce peuvent affecter négativement le rendement laitier. La quantité journalière de lait sécrété continue à diminuer avec l’avancement de la lactation après la fécondation (Coulon et al., 1995). Une durée de 300 à 305 jours est recommandée (Bajwa et al., 2004).

Plus la lactation se prolonge, plus les quantités totales des matières grasses et protéiques augmentent (Tableau 2). Une étude française fait apparaître que l’allongement de la lactation s’accompagne, chez les vaches présentant des lactations longues, d’un accroissement de la quantité des matières grasses et des matières protéiques (Brocard et al., 2010).

Tableau 2: Évolution des quantités totales des matières grasses et protéiques en fonction de la durée de lactation

Durée de lactation QMG (kg) QMP (kg)

< à 300 j 148c 121c

300 ≤ dl < 349 j 160c 133c

350 ≤ dl < 399 j 186b 152b

400 ≤ dl < 449 j 200b 161b

dl ≥ 450 j 240a 195a

Les valeurs suivies de la même lettre ne présentent pas de différences significatives.

Les valeurs suivies de lettres différentes sont significativement différentes.

Effet du numéro de lactation sur les paramètres laitiers quantitatifs

Le numéro de lactation a un effet net sur l’évolution des quantités du lait. Il a été rapporté que le niveau de production est fortement corrélé au rang de lactation. En fait, Belhadia et Yakhlef (2013) ont enregistré une corrélation de +0,502 à cet effet pour le nombre de lactations <6 et de -0,304 pour le nombre des lactations > 10. L’analyse statistique a révélé que les quantités (journalière et totale) du lait augmentent avec le numéro de lactation (Tableau 3).

La production laitière totale croit d’une lactation à l’autre jusqu’à la 6ème lactation. Une légère élévation est enregistrée au niveau de la quantité totale du lait entre la 5ème et la 6ème lactation et plus, ce qui dévoile une tendance de diminution à partir de la 6ème lactation et plus. Dans ce cadre, Soltner (2001) a indiqué que la production laitière s’intensifie généralement d’une lactation à l’autre jusqu’à la 3ème ou la 4ème lactation et même au-delà, pour diminuer peu à peu au bout de la 6ème ou 7ème lactation. Pour la quantité totale du lait, la moyenne la plus faible est enregistrée à la première lactation. D’autres études ont montré que le niveau le plus élevé de production, pour des lactations standards, a été enregistré en 4ème lactation (Topalo et Günes, 2010) en 2ème lactation (Çilek, 2009; Bakir et al., 2009; M’hamdi et al., 2012) ou en 3ème lactation (Bakir et Kaygisiz 2013; Sahin et al., 2012; Talbi et El Madidi, 2015).

La production journalière suit le même rythme d’évolution que celui de la production totale. La meilleure valeur est enregistrée à la 6ème lactation et plus, alors que la plus faible est enregistrée à la 1ère lactation. Doko et al., (2012) ont trouvé que la production journalière à la 1ère lactation a été plus faible qu’aux 2ème et 3ème lactations.

Talbi et El Madidi (2015) ont mentionné l’effet significatif du rang de lactation sur la quantité de matière grasse. Cette dernière augmente progressivement jusqu’à un maximum de 211 kg à la 5ème lactation puis une diminution dès la 6ème lactation (Figure 2).

Dans cette optique, Kumaka et Makuza (2005) ont mentionné que la quantité de matière grasse augmente jusqu’à la 5ème parité. Ces résultats ne sont pas conformes avec ceux annoncés par Talbi et El Madidi (2015). Ils ont trouvé que la matière grasse ait connu une augmentation nette jusqu’à un maximum à la 3ème lactation puis une diminution progressive avec les lactations subséquentes. Une étude éthiopienne (Nyamushamba et al., 2014) révèle une augmentation légère et progressive de la quantité de matière grasse de la 2ème parité jusqu’à la 4ème parité sans différences significatives entre les performances à la 2ème, 3ème et 4ème parité. Puis une diminution est notée au cours de la 5ème et la 6ème parité. La quantité de matière grasse augmente de nouveau à la 7ème parité.

La quantité de matière protéique a augmenté de la 1ère lactation jusqu’à la 4ème lactation sans différences significatives entre les performances à la 2ème, 3ème et 4ème parité. Une augmentation significative est enregistrée à la 5ème parité. Puis, la quantité de matière grasse a diminué à la 6ème lactation et plus (Figure 3). Le niveau le plus élevé est atteint à la 5ème lactation. Ce résultat n’est pas conforme avec celui de Nyamushamba et al., (2014) qui ont indiqué que la quantité de matière grasse élevée est enregistrée à la 7ème parité et que les plus faibles niveaux ont été atteints à la 1ère, 5ème et 6ème parité.

Caractérisation qualitative des performances laitières

La composition suit un rythme d’évolution inverse à celui de la quantité du lait (Boujenane, 2010). La composition moyenne du lait enregistrée était de 3,6 ± 0,46% pour TB et de 2,9 ± 0,26% pour TP. Le TB (%) est supérieur aux résultats obtenus en Tunisie par Garrouri (2008) et Bousselmi et al., (2010) qui ont été, respectivement, de 3,5 et de 3,4. Un tel taux est inférieur à la norme européenne qui était de 4,07 et aux moyennes trouvées en France par Hurtaud et al., (2010) et Boutry et al., (2014) qui ont été, respectivement de 3,96 et 3,90. Par ailleurs, le TP (%) est inférieur aux valeurs rapportées par Garrouri (2008) et Bousselmi et al., (2010), estimées respectivement aux 3,05 et 3,13. Il est aussi inférieur aux normes européennes [Bouraoui et al., 2013) et aux moyennes obtenues en France par Hurtaud et al. (2010) et Boutry et al. (2014) qui étaient, respectivement, de 3,23 et 3,20. Cette composition est acceptée selon les normes du lait établies en Tunisie, mais, elle n’est pas compatible aux normes européennes. D’où, les horizons d’exportation de ce produit demeurent encore rarissimes en Europe. En fait, les références sur la qualité du lait en Tunisie témoignent des déficiences. Les facteurs alimentaires sont responsables de la variation de la composition du lait (Coulon et Rémond, 1991). Autres études ont trouvé que le numéro de lactation (Matallah et al., 2015), l’année de vêlage (Nyamushamba et al., 2014) et la saison dont la lactation a commencé (Coulon et al., 1991; Ben Salem et al., 2007; Bousselmi et al., 2010; Matallah et al., 2015 ) sont les principaux facteurs environnementaux qui affectent la composition du lait.

L’analyse de variance a dévoilé que la saison de vêlage, le numéro de lactation et la durée de lactation n’ont montré aucun effet significatif (Tableau 4). L’année de vêlage a révélé un effet très hautement significatif (p < 0,001), témoignant ainsi l’incidence de l’année de vêlage sur la composition du lait, rapportée par une étude éthiopienne (Nyamushamba et al., 2014).

Tableau 4: Sources de variation des caractères qualitatifs de la production laitière

Source de variation ddl TB TP

Eleveur (elev) 8 *** ***

Saison de vêlage (saiv) 1 NS NS

Année de vêlage (av) 5 *** ***

Numéro de lactation (NL) 5 NS NS

Classe de durée de lactation (dl) 4 NS NS

Saiv * av 5 * NS

NS: non significatif; *: significatif au seuil de 5%; ***: hautement significatif au seuil de 1‰

Effet de l’année de vêlage sur la composition du lait

Une variation non régulière des deux taux suivis en fonction des années de vêlage a été observée. Les performances les plus faibles ont été enregistrées en 2014. Les taux élevés ont été obtenus en 2012 (Figures 4 et 5). Pour le TB, des accroissements ont été observés au cours des années 2010, 2012 et 2013 avec une tendance de diminution de 2012 à 2014. Les chutes ont été enregistrées en 2011 et 2014 (Figure 4). Pour le TP, il a diminué de 2009 à 2011, puis il a augmenté en 2012 (Figure 5).

Un déclin est observé de 2012 à 2014. Les changements climatiques d’une année à l’autre (variation du niveau des précipitations), semblent être à l’origine de la variation de la composition du lait. En effet, les variations climatiques peuvent affecter la qualité des ressources alimentaires. Or, la variation des fourrages et des concentrés peut déprécier la qualité du lait (Nyamushamba et al., 2014). Ainsi, suite aux problèmes économiques survenus en Tunisie après la révolution de 2011 et à l’inflation des prix des aliments grossiers et composés, l’éleveur est devenu incapable de satisfaire les besoins de son troupeau, donc des rations inadéquates ont été souvent distribuées aux vaches. Selon les données collectées, on pourrait expliquer la hausse du TB en 2012 par le pourcentage élevé des primipares. Cette catégorie a présenté des TB supérieurs à ceux des multipares (Agabriel et al., 1990). La plupart de ces primipares ont présenté des longues lactations. Or, l’allongement de la lactation s’accompagne chez elles d’un accroissement de la quantité des matières grasses et des matières protéiques (Brocard et al., 2010). Cette situation pourrait justifier la hausse du TB et du TP en 2012. D’une façon générale, la majorité des lactations en 2012 ont été prolongées. Le TB et le TP sont plus élevés chez les vaches avec des lactations longues que chez les vaches avec des lactations normales (Trou et al., 2010). Au contraire, la majorité des vaches en 2014 sont des primipares avec des lactations courtes, ce qui pourrait expliquer la baisse de deux taux en question.

CONCLUSION 

À la lumière des résultats obtenus à partir de cette étude accomplie sur l’élevage bovin laitier mené en système hors sol, on peut ressortir que la filière lait en Tunisie révèle des évolutions contrastées. En effet, un tel élevage se caractérise par des performances laitières aussi bien quantitatives que qualitatives relativement limitées, du fait qu’il est confronté à des diverses contraintes dont les plus importantes sont liées à la baisse des rendements fourragers et à l’inflation des prix des aliments composés.

Le numéro de lactation et la durée de lactation ont montré un effet significatif sur la quantité du lait totale par lactation, la production laitière journalière, la quantité des matières grasses et la quantité des matières protéiques. Le présent travail a également dévoilé l’effet significatif d’un facteur non génétique qui est l’année de vêlage sur la composition du lait. D’où, il s’avère nécessaire d’homogénéiser les conditions du milieu d’élevage afin que les vaches puissent extérioriser leurs potentialités laitières.

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