Résumé

La multiplication végétative de l’arganier par bouturage a été menée dans une enceinte vitrée dont l’humidité relative et la température moyenne étaient de 80 % et 25°C respectivement. Le premier essai a concerné des boutures herbacées prélevées sur des têtes de clones sélectionnés sur la base de la productivité, de la vigueur et de la capacité de production de boutures à différents niveaux (hauteurs) de l’arbre. Trois facteurs ont été pris en compte, l’âge du pied-mère, la position du ramet sur l’arbre et le traitement à l’acide indole-butyrique (AIB), hormone rhizogène dont les concentrations étaient de 1000 et 2000 ppm comparées à un témoin traité à l’eau distillée. Le deuxième essai avait pour objectif de contrôler les conditions globales du bouturage telles que la lumière, l’humidité relative de l’air et la température du substrat ainsi que la qualité des boutures: herbacées, semi-ligneuses et ligneuses. Le taux d’enracinement global a été amélioré entre le premier et le deuxième essai. Il est passé de 25 % dans les conditions non contrôlées à 100 % dans les conditions contrôlées chez quelques clones. Les jeunes arbres ont présenté la plus grande aptitude à l’enracinement. L’analyse de la variance a montré un effet hautement significatif du caractère tête de clone et de la position du ramet sur l’enracinement, le poids sec et la longueur moyenne des boutures. Par contre, aucun effet significatif n’a été observé pour le traitement auxinique sur ces variables. Le meilleur résultat (100 % d’enracinement) a été obtenu pour les boutures apicales et médianes des rejets d’arbres jeunes en conditions contrôlées. L’âge des arbres a un effet hautement significatif sur la qualité des racines dans la mesure où les boutures issues de jeunes arbres ont montré une supériorité quant au poids sec et à la longueur des racines. L’étude comparative entre le système racinaire issu du bouturage et celui issu des semis a montré que les semis se caractérisent par une racine pivotante bien développée alors que les boutures qui développent un amas cellulaire donnent naissance à plusieurs racines orthotropes.


Mots clés : Arganier, bouturage, âge des pieds-mères, position du ramet, AIB, enracinement.


 

INTRODUCTION

L’arganier est un arbre endémique du Maroc qui couvre une superficie d’environ 871.000 ha (HCEFLCD, 2017). Au cours du XXème siècle, plus de la moitié de l’arganeraie marocaine a disparu, principalement dans les plaines et sa densité moyenne est passée de 100 à moins de 30 souches/ha (Charrouf et Guillaume, 2007).

La propagation par semis a montré une hétérogénéité considérable au niveau de la vitesse de croissance, de l’architecture du plant, de la floraison et de la production de biomasse utile (El Mousadik, 1997). Théoriquement, la propagation par bouturage de clones sélectionnés est une alternative qui pourrait améliorer la qualité des plants (Ferradous, 1995; Bani-Aameur et al., 1999; Bellefontaine, 2010). En effet, le bouturage permet de produire des plants identiques aux pieds-mères. Cependant, la difficulté de l’enracinement des boutures limite l’utilisation de cette technique (Alouani, 2003). Le taux d’enracinement dépend du génotype et les meilleurs résultats ont été obtenus à partir de bois tendre désinfecté pour éviter la contamination fongique (Nouaim et al., 2002).

Les travaux menés sur le bouturage (Mokhtari et Zakri, 1998; Harrouni et al., 1999; Mokhtari et al., 2013) montrent que les meilleurs résultats pour cette technique se réalisent sous conditions de serre à climat contrôlé.

Les racines issues des boutures sont fragiles, ce qui risque de constituer un facteur limitant pour la reprise des plants à la transplantation.

L’arganier est une plante qui requiert des conditions particulières pour sa multiplication par bouturage. Il s’agit tout d’abord de disposer de matériel végétal vigoureux et de le placer par la suite dans des conditions d’hygrométrie et de température adéquates (humidité relative supérieure à 70 % et température aux alentours de 30°C (Harrouni, 2002)). Les conditions d’humidité relative élevée sont nécessaires pour maintenir les boutures vivantes jusqu’à l’émission des racines. En effet, l’enracinement ne commence chez les boutures qu’après 45 jours même chez les sujets les plus aptes à la rhizogénèse. La saison du bouturage a également un effet sur l’enracinement avec une augmentation du taux d’enracinement et une réduction des pourritures (Harrouni, 2002).

Le présent travail a pour objectif l’étude de l’effet de certains facteurs sur le bouturage de l’arganier, à savoir : l’âge du pied-mère, la position du ramet sur l’arbre, le traitement à l’acide indole-butyrique (AIB) et le contrôle des conditions de multiplication (température du substrat, humidité relative de l’air et saison de prélèvement).

MATÉRIEL ET MÉTHODES 

Sites d’étude et d’expérimentation

Le bouturage a été appliqué sur des têtes de clones de spécimens d’arganiers dans un site forestier faisant partie de la forêt d’Admine (15 km au sud-est de la ville d’Agadir, Maroc), géré par la Direction des Domaines Agricoles (Les Arômes du Maroc) en partenariat avec le Haut-commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification. Les arganiers sont sélectionnés sur la base de leur productivité, leur vigueur et leur aptitude à produire des boutures.

Matériel végétal

Dans le but d’optimiser les conditions de bouturage de l’arganier, trois essais successifs ont été réalisés dans différentes conditions expérimentales. Dans le premier essai, le matériel végétal était constitué de boutures herbacées apicales, issues de 3 arbres jeunes et 3 arbres adultes considérés comme têtes de clones (identifiés par les chiffres 1, 2 et 3 pour les jeunes et 4, 5 et 6 pour les adultes). Un nombre de 189 boutures ont été prélevées de chaque arbre à 3 niveaux différents (63 boutures pour chaque niveau) : la base (Rejets), la mi-hauteur et la partie apicale des arbres. Le nombre global des boutures était de 1134.

A la lumière des résultats du premier essai, deux arbres considérés têtes de clones, un adulte et un jeune, ont été étudiés avec plus de détail. Des boutures ont été prélevées pour étudier trois facteurs: type de bouture (herbacée, semi-ligneuse et ligneuse), concentration de l’acide indole butyrique (AIB, 1000 et 2000 ppm) et âge de l’arbre (adulte (>40 ans) et jeune (8 ans)).

Par ailleurs, un troisième essai a été réalisé pour comparer l’aspect du système racinaire issu du bouturage avec celui des semis.

Une fois prélevées, les boutures étaient transportées dans une glacière réfrigérée jusqu’à leur plantation dans la même journée. Les arbres étudiés ont reçu des irrigations fréquentes pendant 3 mois avant le prélèvement des boutures.

Préparation des boutures

Concernant les deux premiers essais, les boutures étudiées ont été découpées en tronçons de 6 cm de long puis trempées dans une solution désinfectante (Germox 0,1 %, à base d’hypochlorite de calcium) avant d’être rincées 3 fois à l’eau distillée stérile. Les bases des boutures ont été ensuite trempées pendant 5 secondes dans une solution hormonale contenant de l’AIB aux concentrations 1000 et 2000 ppm pour le premier essai avec un témoin constitué d’eau distillée et seulement 1000 ppm d’AIB pour le deuxième essai. Les boutures ont été placées dans des plaques alvéolées contenant un substrat composé de 50 % de tourbe noire et 50 % de sable stérilisé à l’autoclave (1 heure, 121°C, 1 bar). Afin de comparer le système racinaire issu du bouturage avec celui des semis, des graines ont été mises à germer 3 mois après le début du bouturage. Ce décalage a été laissé pour permettre aux boutures de s’enraciner du fait que les racines des boutures n’apparaissent généralement qu’après 3 mois.

Conditions de germination des graines

Des graines d’arganier récoltées du domaine d’Admine sur les arbres têtes de clones à partir desquels les boutures ont été prélevées, ont été décortiquées, lavées et désinfectées avec une solution de Germox 0,1 % puis rincées. Après 24 heures d’imbibition, elles ont été mises à germer dans un mélange de sable et de tourbe noire à parts égales.

Conditions expérimentales

L’expérimentation a été réalisée à l’intérieur d’une serre à environnement non contrôlé à l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, Complexe Horticole d’Agadir. Le protocole expérimental consistait en 3 blocs aléatoires complets (BAC) avec sept répétitions pour tous les essais selon les conditions particulières suivantes:

Conditions non contrôlées

Les essais de bouturage ont été menés dans des enceintes vitrées pour maintenir une humidité relative de l’air élevée et une température adéquate.

Conditions contrôlées (température, humidité relative de l’air, éclairage)

Le deuxième essai consiste à étudier le taux de réussite et la qualité des boutures dans une enceinte vitrée sous des conditions plus contrôlées. L’humidité relative était maintenue à 95 % en utilisant un humidificateur lié à un hygrostat. Le chauffage du substrat à l’intérieur de l’enceinte était réglé automatiquement sur 30 °C à l’aide de résistances électriques. L’éclairage complémentaire a été appliqué 2 mois après le début de l’essai grâce à deux lampes au néon allumées 18h/24h actionnées par une minuterie.

Germination des graines

Les plaques alvéolées contenant les graines ont été disposées dans la serre avec une irrigation régulière selon les besoins.

Paramètres étudiés

À la fin de chaque essai, les boutures survivantes ont été soigneusement retirées des plateaux alvéolés puis lavées et rincées à l’eau du robinet.

Pour le premier essai, les observations et les mesures effectuées après 6 mois ont porté sur le taux d’enracinement, le nombre, la longueur et le poids sec des racines ainsi que sur le taux de production de cal pour les boutures qui n’ont pas produit de racines.

Le deuxième essai a été suivi pendant 12 mois après le démarrage du bouturage pour déterminer les variables suivantes: taux de survie, pourcentage d’enracinement, longueur des boutures, longueur des racines et poids sec des racines.

Le troisième essai a porté sur la comparaison du système racinaire des plantules obtenues du deuxième essai de bouturage (âgées de 12 mois) avec celui de plantules issues de semis de graines âgées de 9 mois.

Analyses statistiques

Les données ont été traitées par le logiciel Statistica, version 6.0. L’analyse de la variance (ANOVA) a été utilisée pour déterminer le degré de signification. Les moyennes ont été comparées en utilisant les tests de Newman et Keuls au seuil de probabilité p<5 %.

RÉSULTATS ET DISCUSSIONS 

Essai 1

Les résultats du bouturage de l’arganier dans des conditions non contrôlées suggèrent que le taux d’enracinement varie selon les clones. L’analyse de la variance a montré que cette variation est affectée par l’âge et par la position des boutures sur l’arbre. Ces résultats sont comparables à ceux obtenus par Hartmann et Hansen, (1958) et Tousignant et al., (1996). Les meilleurs résultats d’enracinement ont été obtenus chez les boutures issues des jeunes arbres appartenant au clone 3, qui a présenté une certaine aptitude à l’enracinement (25 %).

Les résultats représentés par la figure 2 montrent que les boutures de l’arganier peuvent survivre plus de 6 mois sans produire de racines. Le taux d’enracinemement obtenu varie entre 0 et 25 %, alors que le taux de calogènese peux atteindre 80 % selon les génotypes. Afin d’augmenter le taux d’enracinement, il est recommandé de rehausser progressivement l’intensité lumineuse après l’apparition des cals (Hartmann et al., 1997). Comme les boutures ne peuvent pas absorber les minéraux durant la période qui précède l’enracinement, elles doivent être prélevées de plants-mères adéquatement fertilisés (Hartmann et al., 1997).

Le poids sec des racines des boutures issues des jeunes arbres montre une supériorité significative par rapport à celui des boutures issues d’arbres adultes tous clones confondus (Tableau 1). Le poids sec des racines des boutures de jeunes arbres était 50 % supérieur à celui des racines des boutures d’arbres adultes.

Tableau 1: Effet de l’âge des pied-mère d’arganier sur le poids sec des racines issues du bouturage herbacé

Origine des boutures Poids sec moyen des racines (g)

Arbres adultes 0,22 b

Arbres jeunes 0,33 a

L’effet positif de la juvénilité des boutures sur l’enracinement a été prouvé aussi chez d’autres plantes à savoir le chêne (Moon et Yi, 1993), le mélèze hybride (Pâques et Cornu, 1991) et Leucaena leucocephala (Dick et al., 1998). D’autre part, le rajeunissement des châtaigniers a permis à (Sánchez et al., 1997) d’obtenir des pousses avec des taux d’enracinement élevés. En outre, la période de prélèvement des boutures peut également affecter la capacité d’enracinement (Badji et al., 1991). Ces auteurs ont montré que les boutures prélevées pendant la période de sécheresse présentent des difficultés d’enracinement par rapport à celles récoltées pendant la saison des pluies.

En plus de l’âge et de la période de récolte, la position des boutures sur l’arbre présente aussi un effet hautement significatif sur le taux d’enracinement et l’élongation racinaire (Tableau 2). Nos résultats montrent que les boutures prélevées de positions basales ont une grande aptitude d’élongation racinaire. Les boutures prélevées à partir de rejets développés à la base des arbres ont une plus grande capacité à produire des racines par rapport aux autres positions (18 % pour les rejets basaux; 3,43 % pour la partie médiane et 4,10 % pour la partie haute à l’échelle de l’arbre) et une plus grande aptitude à l’élongation racinaire (Tableau 2). Par contre, les traitements à l’AIB n’ont pas eu d’effet sur l’enracinement.

Tableau 2 : Effet de la position du ramet sur la longueur des racines

Position du ramet sur l’arbre Longueur moyenne des racines (cm) Taux d’enracinement (%)

Apicale 0,61b 4,10b

Médiane 0,75b 3,43b

Basale 1,34a 18,00a

La position (Topophysis) de la bouture sur l’arbre est déterminante dans la réussite de l’enracinement (Hartmann et al., 1997) et influence l’architecture de la future plante. Mirov ,(1937) et Smith, (1956) sont les premiers à signaler l’importance de l’effet de la position du ramet sur la croissance, le développement et la ramification des boutures. Dans la même vision, Kleinschmidt, (1961) a observé des différences dans la ramification des boutures de quatre ans chez Abies alba provenant de différentes positions du pied-mère.

Chez l’arganier, les boutures de rejets de souches s’enracinent mieux que celles prélevées en haut de l’arbre (Bellefontaine, 2010). D’autres recherches ont prouvé que les pousses jeunes de la base d’un pied-mère relativement âgé s’enracinent mieux que les pousses plus hautes (Dembélé, 2012). Comme le démontrent tous les ouvrages portant sur la multiplication végétative des plantes, il existe de grandes différences entre les espèces et même entre les individus d’une même espèce, certaines s’enracinent en moins de trois semaines alors que d’autres peuvent nécessiter plus de 8 à 10 semaines (Auclair, 2009).

Essai 2

Taux d’enracinement

Un an après la mise en bouturage, le taux d’enracinement dans des conditions contrôlées a permis d’atteindre 76,2 % chez les boutures issues de jeunes arbres et 33,3 % chez les boutures issues d’arbres adultes (Tableau 3) indépendamment du type de bouture (apicale, médiane ou basale).

Tableau 3: Effet de l’âge de l’arganier pied-mère sur l’enracinement des boutures 12 mois après le bouturage

Types d’arbres Taux d’enracinement après 12 mois (%)

Jeunes 76,2 ± 18,9a

Adultes 33,3 ± 18,9b

Les taux d’enracinement obtenus dans le cadre de cette étude sont supérieurs à ceux obtenus par plusieurs travaux sur le bouturage de l’arganier qui oscillaient entre 16 % et 41 % (Kaaya, 1998; Harrouni, 2002; Bellefontaine et al., 2010) et d’autre travaux ont atteint des seuils élevé mais sur un nombre réduit de boutures et dans un temps limité. (Metougui et al., 2017) Ont atteint un taux de 66,7 % chez quelques génotypes. Le micro-bouturage permet un taux d’enracinement plus élevé (80 à 95 %) en fonction des clones (Nouaim et al., 2002). Le type de boutures n’a pas eu d’effets significatifs sur l’enracinement de l’arganier (Tableau 4).

Tableau 4: Effet du type de bouture sur le taux d’enracinement 12 mois après le début du bouturage

Type de bouture Taux d’enracinement (%)

Boutures ligneuses 40,5 ± 29,1a

Boutures semi-ligneuses 52,4 ± 23,3a

Boutures herbacées 71,4 ± 28,5a

Des recherches sur le bouturage du jojoba ont montré que la nature et la concentration de l’auxine utilisée pour induire la rhizogénèse ont une influence statistiquement significative sur le processus d’enracinement des boutures (Houar et al., 2014).

L’enracinement des boutures, surtout pour les espèces récalcitrantes au bouturage, exige des conditions de culture contrôlées. L’humidité relative de l’air, le type et la température du substrat ainsi que la luminosité sont des facteurs qui influencent la viabilité des boutures jusqu’à l’émission des racines (Hartmann et al., 1997). Comme les boutures feuillées transpirent davantage au tout début de la période d’enracinement, il est important de réduire les fortes intensités lumineuses pour éviter le stress hydriques (Loach, 1988). Toutefois, il est essentiel de ne pas apporter trop d’eau par nébulisation ou par arrosage afin d’éviter une accumulation excessive d’eau dans le substrat de propagation qui réduirait l’aération et qui causerait l’asphyxie de la base de la bouture et la contamination fongique (Hartmann et al., 1990; Nouaim et al., 2002; Alouani, 2003).

Croissance des boutures

L’analyse de la variance sur l’effet des trois facteurs (âge, type de bouture et traitement à l’AIB) sur le bouturage de l’arganier en conditions contrôlées montre que les boutures issues d’arbres jeunes ont une capacité de croissance apicale plus importante que les boutures issues d’arbres adultes aussi bien à 8 mois qu’à un an. Ce test montre que pendant les 8 premiers mois, le taux de croissance approche les 80 % pour les boutures issues des arbres jeunes alors qu’il est limité à 11,6 % chez les boutures issues des arbres adultes. La croissance devient plus importante après 12 mois de culture où le taux de croissance a atteint 87 % pour les boutures de jeunes arbres alors qu’il est resté à moins de 20 % dans celles issues d’arbres adultes (Figure 2).

Essai 3

Afin d’évaluer la qualité des racines formées lors du bouturage de l’arganier, elles ont été comparées aux racines issues de semis. Les semis se caractérisent par une racine pivotante (orthotrope) bien développée contrairement aux boutures qui développent un amas cellulaire qui donne naissance à plusieurs racines orthotropes (Figure 3).

L’étude de la longueur des racines des boutures comparées aux semis montre que ce dernier donne un système racinaire plus long que celui des boutures. Cependant, le nombre de racines orthotropes des boutures est toujours supérieur à celui des plantules issues de semis. Les racines secondaires (plagiotropes) sont plus importantes dans le cas du semis comparé au bouturage (Figure 4). Les boutures herbacées et semi-ligneuses donnent plus de racines orthotropes et plagiotropes que les ligneuses (Figures 5 et 6). Ces résultats sont comparables à ceux rapportés par Kaaya, (1998) et Nouaim, (1994).

Cette différence peut être expliquée par le fait que les boutures herbacées sont plus riches en phytohormones et en réserves endogènes que les boutures ligneuses. Ces changements métaboliques dans les zones d’enracinement des boutures dus aux phytohormones sont susceptibles d’inhiber ou de favoriser la régénération des racines (Nanda et Jain, 1972; Nanda, 1975; Bhattacharya et al., 1978; Haissig, 1986; Mato et al., 1988; Haissig et Davis, 1994; Das et Bharghavan, 1997; Hartmann et al., 1997; Druege et al., 2000; Husen et Pal, 2001) . D’ailleurs plusieurs recherches ont signalé que l’acide indole acétique (IAA) favorise l’enracinement des boutures en augmentant la disponibilité du sucre au niveau du collet (Altman et Wareing, 1975; Liu et al., 1998).

CONCLUSION

Ce travail a montré que la multiplication végétative par bouturage de l’arganier est possible comme l’ont prouvé d’autres travaux. Toutefois, la maîtrise de la technique, le choix et l’âge du pied-mère et la position des ramets sur les arbres influencent fortement le taux d’enracinement, la qualité des racines et le développement ultérieur des plantules. L’optimisation du taux d’enracinement nécessite le contrôle des conditions de bouturage telles que la température du substrat, l’humidité relative de l’air dans l’enceinte de multiplication et l’éclairage. D’autre part la sélection de clones peu récalcitrants au bouturage et l’âge des pieds-mères (arbres jeunes ou rajeunis pour induire l’effet de juvénilité) constituent des facteurs qui paraissent plus importants encore que la maitrise des conditions de bouturage. Les conditions dans lesquelles les pieds-mères vivent ont aussi une influence sur l’aptitude au bouturage. Il a été bien établi que le bouturage ne peut pas être efficace dans le cas des forets qui souffrent du stress hydrique. L’irrigation (et peut-être aussi la fertilisation) des pieds-mères est indispensable pour avoir un nombre important de boutures aptes à s’enraciner.

Ce travail a permis de déterminer les facteurs les plus importants pour le bouturage de l’arganier dans les conditions marocaines (région d’Agadir) en prenant en considération des clones à fort potentiel productif. En effet, si la productivité ou tout autre caractère désirable ne constituent pas l’objectif du bouturage, il est préférable de faire recours à la multiplication sexuée qui s’est révélée nettement plus efficace que le bouturage. Tous travaux futurs relatifs à la propagation asexuée de l’Arganier devraient prendre en considération ces aspects génétiques et œuvrer à l’optimisation de l’enracinement chez les clones présentant des caractéristiques désirables. Il est tout aussi important de travailler sur les techniques d’élevage des plantules issues de bouturage pour assurer le maintien du système racinaire fonctionnel après la transplantation au champ.

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