Résumé

Le 2,4-D est un herbicide couramment utilisé dans le monde pour lutter contre les espèces de plantes indésirables du groupe des dicotylédones. L’emploi massif de cet herbicide nécessite la connaissance de son spectre écotoxicologique pour mieux réglementer son utilisation. Cette étude avait pour objet de caractériser la toxicité aiguë et de déterminer les effets à long terme d’un herbicide à base de 2,4-D sur Eudrilus eugeniae. Les essais ont été réalisés à Azaguié (Côte d’Ivoire), sur du sol naturel enrichi aux crottes de lapin. La concentration létale (CL50) du 2,4-D a été 175,6 ± 12,3 mg/kg. L’exposition des vers à 20 mg/l de 2,4-D soit 9,2 mg/kg, a réduit significativement la production de cocon, le taux d’éclosion et le nombre de juvéniles/cocon. Vue l’innocuité de cette formulation envers E. eugeniae, elle constitue une menace potentielle pour les vers de terre. La situation est inquiétante car la CL50 de l’herbicide a été inférieure à la dose recommandée par son fabricant (1920 mg/l et 2880 mg/l).


Mots clés: 2,4-D, Eudrilus eugeniae, formulation, toxicité aiguë, effet à long terme.


 

INTRODUCTION 

Le 2,4-D ou 2,4-dichlorophénoxyacétique est un herbicide sélectif utilisé contre les dicotylédones. Sa sélectivité envers les dicotylédones l’inscrit dans le contingent des herbicides les plus employés pour lutter contre les adventices des cultures céréalières et des plantes vivaces de la famille des monocotylédones. Il est même utilisé en hygiène public pour l’entretien des pelouses. Il fait partie des auxines de synthèse et est classé dans les groupes 4 et O, respectivement par le Weed Science Society of America (WSSA) et le Herbicide Resistance Action Committee (HRAC) (Retzinger et Mallory-Smith, 2003). Il provoque chez les dicotylédones, la stimulation des hormones naturelles, ce qui provoque la croissance cellulaire anormale suivie de la mort de la plante (Grossmann, 2000; Song, 2014).

A l’instar des autres pesticides, l’usage récurent des herbicides à base de 2,4-D peut compromettre l’équilibre des écosystèmes tels que le sol et les eaux de surface dans la mesure où les tests de toxicité et d’écotoxicité qui conduisent à l’homologation des produits phytosanitaires ne tiennent pas compte des co-formulants (ingrédients inertes) alors que ces derniers sont parfois dotés de toxicité envers les organismes ou provoquent un «effet cocktail» toxique (U.S. EPA, 2004; U.S. EPA, 2014; Cox et Surgan, 2006). Aussi, les tests d’homologation sont-ils réalisés en conditions expérimentales ou en milieu tempéré; ce qui conduit à une sous-estimation des effets toxicologiques des molécules agrochimiques car l’amplitude et la diversité des effets des pesticides sont intimement liés aux conditions climatiques (Van den Brink et al., 2003; De Silva et al., 2009). Ainsi, ces produits peuvent affecter la biodiversité des organismes des sols tropicaux notamment les vers de terre qui jouent un rôle important dans la décomposition de la matière organique. En effet, les vers de terre présentent une grande sensibilité à la plupart des polluants (Zarea et Karimi, 2011).

Pour mieux évaluer le spectre écotoxicologique des pesticides en général et des herbicides en particulier, les tests d’écotoxicité doivent tenir compte de l’ensemble de la formulation et non des matières actives seules. En outre, les tests doivent se réaliser en milieu naturel, sur un plus grand nombre d’espèces vivantes et sous différents climats, notamment le climat tropical où les essais écotoxicologiques sont moindres.

La présente étude vise à évaluer la toxicité d’un herbicide à base de 2,4-D envers le vers de terre Eudrilus eugeniae sur un sol naturel enrichi aux crottes de lapin.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Détermination des paramètres physico-chimiques du sol

La masse de chaque échantillon d’analyse a été de 200 g et chaque échantillon de sol a été prélevé à la profondeur de 0-10 cm. La teneur en matière organique du sol a été déterminée par la méthode de la perte au feu à l’aide d’un four à moufle (Nabertherm, Allemagne) (CEAEQ, 2003; Hasine et al., 2008). Le pH (eau) du sol a été déterminé par électrométrie à l’aide d’un multimètre HQ40d (Hach, États-Unis), selon le protocole de détermination du pH élaboré par le Centre d’Expertise en Analyse Environnementale du Québec (CEAEQ, 2003). La conductivité a été déterminée selon la méthode de l’extrait dilué (Montori, 1997). L’azote a été déterminé par la méthode de Kjeldahl décrite par la norme française NFV04-407(AFNOR, 2002). Le minéralisateur utilisé était de type Speedigesteur (Buchi, Suisse) et le distillateur était de type FB15025 (Fisher Scientific, États-Unis). Le phosphore a été dosé par la méthode AOAC-958.01 (AOAC, 1990). Les concentrations de phosphore ont été déterminées à l’aide d’un spectrophotomètre UV/VIS type UVProbe 1700 (Shimadzu, Japon). La méthode de détermination de la granulométrie a été inspirée de la méthode V4.0-10-2012 du Manuel du Laboratoire Sol et Végétation. Le tamis utilisé lors de la détermination de la granulométrie était de type AS200 (Retsch, Allemagne) et de norme ISO 3310-1. La capacité de rétention en eau du sol a été déterminée conformément à la méthode décrite par la norme ISO 11268-2:1998 (ISO, 1998).

Culture des vers de terre

La culture des vers de terre a été réalisée avec des individus capturés sur le site d’étude (Azaguié). Pour ce faire, des tas de crottes de lapin ont été déposés sur le site d’étude puis arrosés régulièrement pour favoriser le développement d’Eudrilus eugeniae. Au bout de trois semaines, les individus sont apparus dans les pièges. Les individus capturés ont été pesés à l’aide d’une balance électronique (PRO-J038) dont la précision était de ±0,001g, puis répliqués sur des milieux de culture préparés à partir de sol de jachère séché, tamisé et de crottes de lapin. Les crottes de lapin ont été stérilisées en les chauffant à l’étuve à 105°C durant 4 heures. Le tamisage des crottes de lapin et du sol a été réalisé à l’aide d’un tamis de 2 mm de diamètre (Retsch, Allemagne). Les milieux de culture des vers ont été préparés dans des bacs transparents en plastique de dimensions 42 cm x 32 cm x 22 cm. Les fonds des bacs ont subi de fines perforations afin de permettre le suintement en cas d’éventuel excès d’eau. Ces perforations ont été recouvertes de grillage de 500 µm de diamètre afin d’empêcher l’évasion des vers. Chaque milieu de culture a été constitué 7,5 kg de sol sec au-dessus desquels 1,7 kg de crottes de lapin a été déposé, de sorte à atteindre en tout un 10 cm d’épaisseur. Les couvercles des bacs ont été perforés de fins trous pour permettre l’aération du vivarium (OCDE, 1984; CEAEQ, 2012). La température et l’humidité des milieux de culture ont été suivies à l’aide d’un thermomètre à sonde (Datalogger RS1315, Taiwan) et d’un thermo-hygromètre de type KW9232 (Intertronic, Allemagne). La culture des vers a débuté avec 8 géniteurs. Le milieu de culture des géniteurs a été fouillé chaque semaine afin d’isoler les juvéniles sur de nouveaux milieux. Cette démarche a permis de purifier la souche des vers de terre.

Formulation d’herbicide

La formulation de 2,4-D utilisée (Herbextra 720 SL) était de type liquide soluble (SL). Elle était dosée à 720 g de 2,4-D (sel d’amine) par litre de solution commerciale. La dose recommandée était de 40 à 60 ml pour 15 litres d’eau. Les doses recommandées correspondaient respectivement à des solutions de 1920 mg/l et de 2880 mg/l. Le numéro de lot était 20150618 et l’année de péremption était prévue pour 2018. Cette formulation a été commercialisée par la firme Louis Dreyfus Commodities (Côte d’Ivoire).

Toxicité aiguë

Préparation des milieux et des solutions testées

Le protocole des tests de létalité a été inspiré de la ligne directrice pour les essais de produits chimiques, élaborée par L’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE); de la méthode SPE 1/RM/43 d’Environnement Canada et de la méthode MA. 500 - VTL1.0, développée par le Centre d’Expertise en Analyse Environnementale du Québec (OCDE, 1982; Environnement Canada, 2004; CEAEQ, 2012).

Les milieux d’essais ont été préparés à partir de boîtes transparentes en plastique de 500 ml, de 300 g de sol naturel (sol de jachère) séché à l’air libre et tamisé, au-dessus desquels 27 g de crottes de lapin chauffés à l’étuve (BINDER) à 105°C durant 4 heures et broyés, ont été déposés. La capacité de rétention en eau (CRE) du sol a été déterminée selon la norme ISO11268-2:1998 (ISO, 1998) et la méthode proposée par Environnement Canada (Environnement Canada, 1994).

Les solutions de 2,4-D ont été préparées à partir du produit commercial (formulation) et d’eau de fontaine afin d’être proche des conditions observées par le monde paysan. Des seringues de 1 cc et 10 cc ont été utilisées pour prélever avec précision les produits commerciaux. Huit (08) concentrations différentes de 2,5-D (20, 50, 125, 250, 500, 1000, 1500 et 2000 mg/l) ont été préparées puis additionnées aux milieux, la veille de l’ajout des vers de terre. Pour chaque solution, 5 répétitions ont été réalisées à raison de 3 vers adultes (1300 mg) par boîte, soit un total de 15 vers par solution. Des témoins négatifs (sans 2,4-D) ont été également constitués en 5 réplicas afin d’évaluer la toxicité intrinsèque des milieux, l’état de santé des vers et la validité du test. Durant le test, aucune nourriture supplémentaire ni apport en eau n’a été réalisé afin d’éviter une modification de la concentration des produits commerciaux dans les milieux d’essai. Le volume de bouillie apporté à chaque milieu a été de 150 ml; ce qui correspondait sensiblement à la CRE du sol. Les essais ont été réalisés à trois reprises afin d’obtenir des valeurs moyennes du nombre de terre tués.

Détermination des concentrations létales

Les concentrations médianes ou CL50 ont été déterminées à l’aide du modèle Probit qui est une régression logistique permettant de comprendre et de prédire les effets d’une série de variables explicatives sur une variable réponse binaire. Ce modèle de régression (Probit) est couramment employé pour modéliser l’effet des doses en médecine, en agrochimie ou en chimie (Cochran et Finney, 1979 ; OECD, 2002). La fonction de distribution du modèle Probit est basée sur la fonction de distribution de la loi normale. Selon Cramer (2003), la fonction de répartition de ce modèle est la suivante:

σ: écart type de la variable explicative (u)

Lorsque la variable aléatoire (u) suit la loi normale centrée réduite N (µ=0, σ =1), on obtient:

Dans la présente étude, la variable explicative (u) désignait une fonction du logarithme à base 10 (Log) des concentrations d’herbicide tandis que la variable réponse constituait l’effet létal des solutions d’herbicide. Cette dernière variable est binaire dans la mesure où elle s’exprime en deux modalités: mort ou vie des vers de terre.

L’explicitation de F(u) permet de prédire dans un tableau, les pourcentages de réponse et les concentrations ou doses qui leur sont associées, ainsi que l’intervalle dans lequel se situe chaque concentration ou dose. La qualité du modèle d’ajustement est mesurée à travers le Khi2 associé à -2 Log (Vraisemblance) et au log (concentration de l’herbicide). Le Khi2 associé à -2 Log (Vraisemblance) est l’équivalent du coefficient de détermination (R2) et du test F de Fisher du modèle linéaire. Le Khi2 associé à -2 Log (Vraisemblance) permet d’évaluer si la variable explicative apporte une quantité d’information significative pour expliquer la variabilité de la variable binaire tandis que celui associé au log (concentration de l’herbicide) évalue la quantité d’information qu’apporte le logarithme à base 10 des concentrations d’herbicide pour expliquer la variable binaire. Les faibles valeurs du Khi2 (<5%) indiquent une bonne qualité du modèle logistique. Le modèle logistique génère également la mortalité naturelle théorique des individus (vers de terre). Cette mortalité théorique est comparée à la mortalité des individus du milieu témoin afin de déceler si des facteurs autres que les substances testées sont impliqués dans la mort des individus. Lorsque la mortalité naturelle théorique est inférieure à la mortalité naturelle observée, on conclut que les substances testées sont les seuls facteurs impliqués dans la mort des individus; mais quand la mortalité naturelle théorique est supérieure à la mortalité naturelle observée, on conclut que des facteurs autres que les substances testées sont impliqués dans la mort des individus.

Tests de toxicité chronique

Effet du 2,4-D sur la production des cocons

Pour mesurer l’effet du 2,4-D sur la production des cocons, le substrat des vers a été préparé selon protocole décrit dans la partie méthodologie. Les vers utilisés étaient âgés de 35 jours avec une masse moyenne 1300 ± 20 mg et la solution de 2,4-D était dosée à 20 mg/l. Le volume de bouillie apporté à chaque milieu a été 150 ml; ce qui correspondait à la capacité de rétention en eau du sol. Pour chaque solution, 10 répétitions ont été réalisées avec 2 vers de terre par boîte, soit un total de 20 vers par solution. Des témoins négatifs, ont été également constitués en 10 réplicas afin d’évaluer la toxicité intrinsèque des milieux sans herbicide, l’état de santé des vers et la validité du test. Un apport de 27g de broyat de crottes de lapin a été fait à chaque milieu toutes les deux semaines. Le séjour des vers dans les milieux d’essais a été de 35 jours. Pour chaque concentration, le nombre de cocons pondus par chaque couple a été noté. Les essais ont été répétés trois fois.

Effet du 2,4-D sur le taux d’éclosion

Des cocons pondus dans les milieux contaminés au 2,4-D (20 mg/l soit 9,17 mg/kg) ont été chacun mis en culture sur du milieu non contaminé. Le nombre de cocons utilisés a été de 60 à raison d’un cocon par milieu. Un total de 60 cocons issus de milieux non contaminés ont été isolés chacun sur du milieu témoin (milieu non contaminé) afin de mesurer l’effet intrinsèque du sol sur l’éclosion. Chaque milieu a reçu 150 ml d’eau de fontaine. Les essais ont été répétés trois fois. La durée d’incubation a été de 17 jours. Le taux d’éclosion a été obtenu par la formule suivante:

Te (%): taux d’éclosion;

NCE: nombre de cocons éclos;

NTC: nombre total de cocons mise en culture.

Effet du 2,4-D sur le nombre de juvéniles/cocon

Des cocons pondus dans les milieux contaminés au 2,4-D (20 mg/l soit 9,17 mg/kg) ont été chacun mis en culture sur du milieu non contaminé afin d’éviter la toxicité des herbicides sur les juvéniles. Le nombre de cocons utilisés a été de 60 à raison d’un cocon par milieu. Un total de 60 milieux témoins (milieux non contaminés) hébergeant chacun un cocon issu d’un milieu non contaminé au 2,4-D, a été utilisé pour mesurer l’effet intrinsèque du sol sur le nombre de juvéniles par cocon. Chaque milieu a reçu 150 ml d’eau de fontaine. La durée d’incubation a été de 17 jours. Le nombre d’individus par cocon a été obtenu en dénombrant les vers présents dans chaque milieu puis en calculant la moyenne d’individus apparus par l’expression suivante:

̅x : moyenne

N : nombre total de cocons;

xi : effectif des vers de la ième boîte (milieu).

Effet du 2,4-D sur la biomasse

L’effet du 2,4-D sur la croissance en biomasse a été évalué sur les vers de terre adultes. Pour ce faire, la solution de 20 mg/l de 2,4-D et des vers âgés de 35 ont été utilisés. Le volume de bouillie apporté à chaque milieu a été 150 ml; ce qui correspondait à la capacité de rétention en eau du sol. Trente réplicas ont été réalisés pour le milieu contaminé au 2,4-D. Pour le milieu non contaminé (témoin) trente réplicas ont été également réalisés. Un vers adulte a été placé dans chaque milieu puis sa masse a été suivie durant une exposition de 35 jours. Les essais ont été réalisés à trois reprises.

Analyse statistique

Le modèle de régression logistique Probit utilisé pour l’établissement de la courbe dose–réponse et la détermination des concentrations médianes ou CL50 de l’herbicide a été réalisé par le biais du logiciel Xlstat 2015 version 4.01.

Le test U de Mann-Whitney a été utilisé pour évaluer:

• La différence entre le nombre de cocons pondus des milieux témoins et celui des milieux contaminés,

• La différence entre le nombre d’individus par cocon des milieux témoins et celui des milieux contaminés, et

• La différence de biomasse entre les milieux contaminés et les milieux non contaminés.

Le test de Kruskal-Wallis a été utilisé pour évaluer:

• La variabilité du nombre de cocons pondus dans chaque type milieu lors des trois essais, et

• La variabilité d’individus par cocon de chaque type milieu lors des trois essais.

Le Khi2 a été utilisé pour évaluer la liaison entre le taux d’éclosion et la nature des milieux.

Le test U de Mann-Whitney, le test de Kruskal-Wallis et le Khi2 ont été réalisés à l’aide du logiciel Xlstat Pro version 7,5. Le niveau de signification des tests a été fixé à 5%.

RÉSULTATS

Paramètres physico-chimiques

Au total, 30 échantillons de sol ont été analysés pour la détermination de neuf (9) paramètres physico-chimiques à savoir le pH, la conductivité, la matière organique, l’azote total, le carbone organique, le rapport carbone/azote, le phosphore total et la granulométrie. Le pH moyen, la capacité de rétention eau, la teneur en matière organique du sol, ont été respectivement 5,7 ± 0,16%, 42,1 ± 1,69% et 7,4 ± 0,04%. Le rapport C/N et la teneur en phosphore total ont été respectivement 8,6 ± 0,57 et 13,8 ± 1,06 mg/kg. La conductivité électrique du sol a valu 116 ± 8,74 µS/cm. Ce sol était constitué de 74,8 ± 1,28 % de sables, de 24± 1,26 % de limons et de 1,2 ± 0,38 % d’argile. Les valeurs moyennes de tous les paramètres physico-chimiques ont été enregistrées dans le Tableau 1.

Tableau 1: Paramètres physico-chimiques du sol

cond: conductivité; COT: carbone organique total; MO: matière organique; N: azote; C/N: carbone/azote; CRE: capacité de rétention eau; Ptotal: phosphore total

Durant la culture des vers de terre, la température moyenne du sol a été 28,7 ± 1,6°C, l’humidité relative du milieu a été 86,7 ± 2,5 %.

Toxicité aiguë (Concentration létale (CL50) du 2,4-D)

Le nombre de vers de terre tués croît sensiblement à mesure que la concentration de 2,4-D augmente. Le nombre de vers tués a oscillé entre 0 -13 pour l’essai 1 et entre 0-14 pour les essais 2 et 3. La mortalité observée a été 0% pour l’essai 1 et 3 et 6,7 % pour l’essai 2 (Tableau 2).

L’évaluation de la linéarité entre les concentrations de 2,4-D et la mortalité des vers de terre a conduit à des probabilités du Khi2 (Pr > Khi²) associés à -2 Log (vraisemblance) inférieures à 0,01% pour chaque essai. La variable explicative (concentration de 2,4-D) apporte une quantité d’information significative à la variabilité de la mortalité des vers de terre vu (Pr > Khi²) < 5%. En d’autres termes, le 2,4-D est fortement impliqué dans la mort des vers de terre (Tableau 3).

En ce qui concerne la régression logistique (Probit), la probabilité du Khi2 (Pr > Khi²) associée au logarithme à base 10 de la concentration de 2,4-D (mg/l) a été inférieure à 5% lors des trois essais. Cela permet de dire que le logarithme de la concentration de 2,4-D apporte une quantité d’information significative à la mortalité des vers de terre. En outre, la mortalité naturelle (0%) générée par le modèle a été inférieure à la mortalité naturelle observée sur les trois essais. Par conséquent, la mort des vers a été uniquement provoquée par le 2,4-D (Tableau 4).

Les courbe concentration-réponse du 2,4-D montrent que tous les points «concentration-réponse» se situent dans l’intervalle de confiance. Cette courbe concentration–réponse permet donc de prédire à un niveau de confiance de 95%, la mortalité des vers de terre en fonction des concentrations de 2,4-D étant donné que tous les points «concentration-réponse» se sont situés dans l’intervalle de confiance. La mortalité naturelle théorique (quasi nulle) est également perceptible sur la courbe concentration-réponse; elle est totalement confondue à l’axe des abscisses (Figure 1, 2 et 3).

Figure 1: Courbe de la concentration-réponse du 2,4-D (Essai 1)

Figure 2: Courbe de la concentration-réponse du 2,4-D (Essai 2)

Figure 3: Courbe de la concentration-réponse du 2,4-D (Essai 3)

La concentration moyenne de 2,4-D qui, appliquée au sol, en une seule fois, tue 50% de la population d’Eudrilus eugeniae au bout de 14 jours a été 382,9 ± 26,7 mg/l pour 327 g de sol sec, soit 175,6 ± 12,3 mg de 2,4-D/kg de sol sec. La concentration létale minimale du 2,4-D a été 118,2 ± 16,6 mg/l, soit 54,2 ± 7,60 mg de 2,4-D/kg de sol sec tandis que la concentration létale maximale a été 697,1 ± 26,9 mg/l, soit 319,8 ± 12,3 mg de 2,4-D/kg de sol sec.

La concentration létale (CL50) de 382,9 ±26,7 mg/l a été inférieure la dose d’emploi (1920-1920-2880 mg/l) recommandée par le fabricant.

Toxicité chronique du 2,4-D

Effet sur la reproduction

Le nombre total de cocons pondus par les couples d’E. eugeniae des milieux témoins a été 294,3 ± 6,70 contre 138,3 ± 8,67 cocons pondus par les vers de terre des milieux contaminés. Lors des essais (E), le nombre moyen de cocons pondus par chaque couple du milieu témoin a été 28,2 ± 2,74 (E1), 30,5 ± 2,73 (E2) et 29,6 ± 2,54 (E3). Au niveau des milieux contaminés, le nombre moyen de cocon pondus par chaque couple a été 13,9 ± 2,85 (E1), 12,3 ± 1,34 (E2) et 15,3 ± 0,76 (E3). Pour chaque essai, le nombre de cocons pondus dans les milieux témoins a été significativement différent de celui des cocons pondus dans les milieux contaminés au 2,4-D (p=0,003 (E1), p=0,0002 (E2) et (E3)). En outre, le nombre de cocons du milieu témoin n’a pas significativement varié sur les trois essais réalisés (p=0,803). De même, le nombre de cocons du milieu contaminés au 2,4-D n’a pas significativement varié sur les trois essais effectués (p= 0,299). Le nombre de cocons pondus dans le milieu témoin a été deux fois plus élevé que celui du milieu contaminé au 2,4-D (Rmoy.= 2,13 ± 0,19). Cet herbicide a réduit de moitié la ponte des cocons chez le ver de terre Eudrilus eugeniae (Tableau 5).

En ce qui concerne l’éclosion des cocons, les trois essais ont montré chacun, que le taux d’éclosion était lié à la nature du milieu (p=0,013 (E1), p=0,001 (E2) et p=0,007 (E3). Le taux d’éclosion moyen des cocons du milieu témoin négatif a été 57,8 ± 2% tandis que celui du milieu contaminé au 2,4-D a été 28,3 ± 0,96 %. L’éclosion des cocons a donc été réduite de 29,4 ± 1,04% par l’herbicide à base de 2,4-D (Tableau 6).

Tableau 6: Proportions des cocons éclos

Pour chaque essai, le nombre d’individus par cocon du milieu témoin a été différent de celui du milieu contaminé (p= 0,0003 (E1), p< 0,0001(E2) et p=0,0002(E3). La variabilité du nombre d’individus par cocon du même type n’a pas été significative d’un essai à l’autre (p=0,854 (milieu témoin) et p=0,724 (milieu contaminé). Le nombre d’individus par cocon a oscillé entre 1 et 6 avec une moyenne de 3,3 ± 0,26 au niveau du milieu témoin. Quant au milieu contaminé au 2,4-D, le nombre d’individus par cocon a fluctué entre 1 et 4, avec une moyenne 2,1 ± 0,22 individus (Tableau 7).

Effet sur la biomasse

Au niveau du milieu témoin, il n’y a pas eu de différence significative entre la masse des vers au début et à la fin du test (p = 0,160 (E1), p=0,212 (E2) et p=0,425 (E3). Au niveau des milieux contaminés au 2,4-D, une absence de différence a été également observée entre la masse des vers au début (p =0,701(E1), p=0,294 (E3)). La concentration de 20 mg/l soit 9,17 mg/kg (sol sec), n’a pas affecté la masse des vers de terre. Il n’y a eu ni augmentation ni perte significative de masse chez le vers de terre Eudrilus eugeniae (Tableau 8).

DISCUSSION

Toxicité aiguë du 2,4-D

Le 2,4-D est un herbicide irritant et sensibilisant (Bonnard et al., 2011) qui présente une affinité pour les animaux. Au niveau des cellules animales, par exemple sur les hépatocytes, cette molécule peut intervenir principalement sur les mitochondries, en augmentant la formation des dérivés activés du dioxygène (O2-, H2O2, HO etc.), responsables de la peroxydation membranaire et de la déplétion du glutathion, d’où l’augmentation de l’apoptose (Picot et Tsakiris, 2013). Cette nocuité du 2,4-D pour les cellules animales pourrait être responsable de sa toxicité accrue envers les vers de terre. Comparée aux données de la littérature, La CL50 du 2,4-D a été plus élevée que celle du Lindane (162,1 mg/kg) et moins élevée que celle de la Deltaméthtrine (432,9 mg/kg) chez l’espèce Eisenia foetida (Shi et al., 2007). Cela montre que le degré de toxicité de l’herbicide à base de 2,4-D à l’égard d’E. eugeniae a été moindre par rapport au degré de toxicité du Lindane envers Eisenia foetida tandis que cet herbicide présenterait une plus grande toxicité envers les vers de terre que ne serait la Deltaméthtrine à l’endroit de ces invertébrés. En outre, la formulation à base de 2,4-D serait plus létale que le produit pur car la CL50 (350 mg/kg sol) (WHO, 1997) de ce dernier a été plus élevée que celle du produit technique. Cette plus grande nocuité de la formulation pourrait s’expliquer par les co-formulants présents dans le produit technique. Ces adjuvants pourraient dans certaines mesures, avoir leurs propres toxicités sur les vers de terre ou avoir un effet synergisant avec le 2,4-D pur (Defarge et al., 2016). Vu, l’infériorité de la CL50 de l’herbicide à base de 2,4-D à la dose d’emploi de cette formulation, l’utilisation de cet herbicide pourrait constituer une menace sérieuse pour les communautés de vers de terre.

Toxicité chronique du 2,4-D

Effet sur la reproduction

La réduction du nombre de cocons par le 2,4-D, chez les vers de terre, pourrait s’expliquer par les modifications morphologiques telles le gonflement de la région clitellaire, les lésions corporelles, les étranglements de la région postérieure, qu’engendre le 2,4-D sur les vers de terre (Correia et Moreira, 2010). Ces modifications sont susceptibles d’empêcher l’accouplement des vers de terre ; par conséquent, la production des cocons pourrait être réduite. La réduction du nombre de cocons provoquée par le 2,4-D chez les vers de terre a été également signalée Correia et Moreira (2010). Les résultats de ces auteurs, ont attesté en effet que le 2,4-D supprime complètement la production de cocons chez E. foetida car aucun cocon n’a été produit dans les milieux dont les teneurs en du 2,4-D étaient 10, 100, 500 et 1000 mg/kg.

En ce qui concerne la réduction du nombre de juvéniles par cocon, elle serait due aux altérations de la multiplication cellulaire et la différenciation que pourrait provoquer le 2,4-D au cours de l’embryogenèse. Cet effet néfaste du 2,4-D sur les embryons a été déjà observé sur l’embryon de poule (Bonnard et al., 2011). Certes le ver de terre et le poulet ne sont pas de la même espèce, mais il est probable que les effets délétères du 2,4-D sur l’embryon du poulet se produisent sur l’embryon de vers de terre car au cours de l’embryogénèse, les processus tels que la segmentation et la gastrulation sont presque similaires chez les animaux. Toutefois, des études supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre le mécanisme par lequel le 2,4-D réduit le nombre de juvéniles par cocon.

Effet sur la biomasse

L’absence d’incidence du 2,4-D sur la biomasse d’E eugeniae pourrait s’expliquer d’une part par le fait que les concentrations utilisées seraient beaucoup faibles pour créer un effet notoire sur la biomasse des vers terre. D’autre part, ce résultat pourrait être dû au fait que le stade développement (stade adulte) des vers utilisés pour le test serait trop avancé pour révéler une variation significative de la biomasse des vers terre en présence de la concentration de 2,4-D employée dans la présente étude. Cette dernière hypothèse est très probable car au niveau des milieux non contaminés, la variation de la masse des vers n’a pas été significative.

Cette absence d’incidence du 2,4-D sur la biomasse des vers de terre a été également observée par Giles (1983) in Dalby (1995). En effet, les travaux de ces auteurs ont montré que le 2,4-D n’a pas d’effet significatif sur la croissance en biomasse du vers de terre malgré la présence de résidus de 2,4-D dans les tissus de l’animal.

CONCLUSION

La toxicité aiguë (mort) de l’herbicide (Herbextra 720 SL) s’est manifestée sur 50% de la population d’Eudrilus eugeniae lorsque que la quantité de l’herbicide atteint 382,9 ± 26,72 mg/l pour 327 g de sol, sec soit 175,6 ± 12,26 mg de 2,4-D/kg de sol sec. Cette CL50 a été inférieure à la concentration de 1920-2880 mg/l, recommandée par le fabricant. En outre, l’herbicide à base de 2,4-D a affecté la reproduction du ver de terre Eudrilus eugeniae. Il a réduit le nombre de cocons, le taux d’éclosion des cocons et le nombre de juvéniles par cocon. Ces effets nocifs suggèrent que l’usage des herbicides à base de 2,4-D est potentiellement dangereux pour les vers de terre. Néanmoins, l’évaluation du risque d’exposition in situ, des vers de terre, aux herbicides à base de 2,4-D est nécessaire afin d’apprécier l’effet réel de ces produits agrochimiques sur les communautés de vers de terre, lors des applications en champ.

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