Résumé

La résurgence des plantes invasives est l’un des problèmes des systèmes agricoles en Afrique Sub-Saharienne, notamment au Bénin. Il est important de porter un regard analytique sur les causes des invasions de plantes en agriculture, pour une meilleure orientation dans le choix des moyens de lutte. Cette revue a pour objectif d’analyser les approches et résultats d’études obtenus sur plusieurs plantes invasives au Bénin, en ressortant les facteurs qui favorisent leur distribution dans les milieux agricoles. Il se dégage, à partir de l’évaluation du potentiel bioécologique d’adaptation des plantes invasives, qu’il y a des facteurs intrinsèques et extrinsèques qui concourent à leur distribution dans les systèmes agricoles. Les facteurs intrinsèques sont liés aux potentiels génétiques et biologiques des plantes invasives tandis que ceux extrinsèques se rapportent pour la plupart aux actions anthropiques et aux conditions environnementales du milieu. La biologie des plantes invasives, les actions anthropiques et le climat sont les facteurs clés de succès des invasions biologiques végétales. L’amélioration des systèmes de cultures, et les prédictions des infestations en lien avec le changement climatique peuvent entre autres aider à limiter les chocs de résurgence des plantes invasives dans les systèmes agricoles.


Mots clés: Espèces exotiques envahissantes, mauvaises herbes, agriculture, climat, Bénin

Introduction

Le Bénin est le pays qui compte le plus de plantes exotiques envahissantes dans la sous-région ouest africaine (Ansong et al., 2019). Les plantes exotiques envahissantes sont des végétaux qui par leur irruption colonisent rapidement de grands espaces dans l’environnement (Sakhraoui et al., 2019). Ce sont des espèces dont l’introduction dans un milieu cause ou est susceptible de causer des dommages économiques et environnementaux (Beck et al., 2008). Elles sont capables d’envahir tout type d’écosystèmes et dotées d’une capacité de dominance qui entraine l’effacement des autres espèces peu concurrentielles. Cette appropriation de l’espace se fait grâce aux caractères propres à ces espèces les rendant plus compétitives vis-à-vis des autres plantes, mais aussi avec le concours des conditions environnementales du milieu d’accueil (Reda et Tewelde, 2018). Les problèmes que posent les espèces exotiques envahissantes sont de plusieurs ordres : socioéconomique, agronomique et écologique. Vissoh et al. (2004), ont rapporté que les problèmes d’ordre socioéconomique des plantes invasives sont surtout liés au temps de travail nécessaire pour le désherbage des champs, et la main d’œuvre y associée qui augmentent les charges de production. Du point de vue agronomique, les plantes invasives peuvent entrainer une érosion génétique des plantes cultivées à travers les croisements naturels avec les espèces du même genre, ayant pour conséquence l’hybridation des variétés (Sakhraoui et al., 2019). Elles peuvent également causer des pertes de rendement agricole par compétition avec les cultures, et aussi développer de résistance aux pesticides habituellement utilisés pour le désherbage. Sur le plan de l’écologie, les plantes invasives constituent l’une des principales causes de perte de biodiversité dans le monde et sont de potentiels foyers de vecteurs de maladies (Young et al., 2017). Assez d’efforts sont faits au plan global pour trouver des moyens appropriés de gestion de ces plantes mais il paraît encore difficile d’y parvenir surtout dans les pays du tiers monde. De nos jours, la plupart des mauvaises herbes de culture sont des plantes invasives qui constituent l’une des principales contraintes de l’agriculture en Afrique Sub-Saharienne (Vissoh et al., 2004). L’une des causes de l’échec des programmes de gestion des invasions biologiques végétales serait la non maîtrise des sources d’infestation et de dissémination des espèces. Il est alors nécessaire d’avoir une idée des voies d’introduction et de distribution des plantes invasives afin de réduire les infestations récurrentes des écosystèmes. Plusieurs espèces de la flore ouest africaine, notamment béninoise, ont été étudiées sous cet angle d’espèces invasives et peuvent servir à définir les modes d’introduction et de distribution des plantes envahissantes au sein de différents écosystèmes. Cet article de synthèse bibliographique a pour vocation d’analyser les approches et résultats d’études obtenus sur plusieurs modèles de plantes invasives au Bénin en vue de ressortir les facteurs d’invasion dans les milieux agricoles. Pour ce faire, des informations ont été rassemblées de diverses sources scientifiques, analysées, et discutées pour donner une idée plus claire des facteurs clés de distribution des plantes exotiques envahissantes à travers les exploitations agricoles.

Clarification de concepts: Plante invasive, plante envahissante, adventice et mauvaise herbe

Pour faciliter la compréhension du contenu de cet article, il est nécessaire de nuancer certains thèmes clés utilisés à savoir plante invasive, plante exotique envahissante, adventice et mauvaise herbe.

Les plantes invasives constituent le thème sous lequel on désigne les espèces exotiques envahissantes. Une espèce exotique est une espèce originaire d’une autre aire de répartition et introduite intentionnellement ou accidentellement dans un nouveau milieu écologique (Russell et Blackburn, 2017). Mais, la définition d’espèce invasive suscite toujours de grandes discussions dans le monde scientifique et au sein des communautés concernées par ces espèces (Lévêque et al., 2012). La définition à laquelle on fait souvent référence est celle retenue par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (IUCN) selon laquelle une espèce invasive est une espèce exotique qui cause des dommages écologiques et socio-économiques (IUCN, 2000). Il apparaît clairement ici que les deux critères de base de la définition sont le statut d’exotique de ces espèces, et leur impact dans le milieu qu’elles colonisent. Bien que de nombreux scientifiques s’accordent sur cette définition retenue par l’IUCN, d’autres cependant s’opposent à l’idée d’inclure l’impact et trouvent donc assez suffisant le critère de l’origine des espèces (Richardson et al., 2000 ; Lévêque et al., 2012). Par contre, Russellet Blackburn (2017) ont soutenu qu’il faut nécessairement considérer l’impact, avec insistance sur sa nature négative, dans la définition. Selon eux, seules les espèces exotiques qui ont d’impacts néfastes peuvent être considérées comme envahissantes, et non celles qui ont d’impacts positifs ou qui n’en ont pas du tout. De ce point de vue, il est à distinguer en biologie les thèmes « exotique » et « invasif » et clarifier que toute espèce exotique n’est pas systématiquement invasive. Il parait aussi nécessaire, de clarifier dans cet article les nuances entre adventice et mauvaise herbe. Une adventice, au sens botanique, est une plante exotique accidentellement introduite dans un milieu, alors qu’une mauvaise herbe est une plante indésirable dans l’espace et dans le temps (Godinho, 1984). Bien qu’il soit courant de rencontrer des plantes qui sont à la fois adventices et mauvaises herbes, il faut cependant clarifier que toute plante adventice n’est pas une mauvaise herbe et que toute mauvaise herbe n’est non plus une adventice. Une communauté de mauvaises herbes est alors généralement constituée de plantes exotiques (adventices) et de plantes indigènes. Dans cette revue, il sera abordé essentiellement les plantes invasives des écosystèmes agricoles, donc les mauvaises herbes envahissantes, qui sont une contrainte majeure en agriculture. Au regard de cela, il parait judicieux de s’aligner sur la position de l’IUCN, et de définir alors comme plante invasive, toute espèce végétale exotique envahissante qui crée des dégâts d’ordre écologique et socioéconomique dans un habitat hors de son aire d’origine.

Facteurs de développement des plantes invasives

Les plantes invasives, lorsqu’elles sont introduites dans un milieu, arrivent à le coloniser grâce à des potentiels particuliers sur lesquels elles s’appuient. Ces potentiels peuvent être rangés dans deux grandes catégories distinctes à savoir, les potentiels propres aux plantes elles-mêmes et les conditions environnementales et externes favorables à leur extension. Ces catégories de conditions sont désignées dans cette revue sous les thèmes respectifs de facteurs intrinsèques et de facteurs extrinsèques.

Facteurs intrinsèques

Les facteurs intrinsèques de l’invasion des plantes sont liés à leurs potentiels génétiques et biologiques d’adaptation. Les plantes exotiques envahissantes ont pour la plupart des traits particuliers qui les distinguent des espèces autochtones et qui favorisent leur distribution. Au nombre de ces caractéristiques, il y a la biologie de reproduction, les différentiations génotypiques et morphologiques intraspécifiques, l’allélopathie (Meerts et al., 2004).

La biologie de reproduction des espèces végétales inclus de nombreux traits caractéristiques tels que le type et la morphologie des organes de reproduction, la nature de la reproduction et le type de fécondation. Certaines plantes exotiques envahissantes sont capables de se reproduire par les deux modes à savoir la reproduction sexuée et celle asexuée (Sakhraoui et al., 2019). Commelina benghalensis L. et Imperata cylindrica (L.) Raeuschel, deux adventices de grande importance au Bénin se retrouvent dans cette catégorie. En effet, bien que se reproduisant par les graines, C. benghalensis et I. cylindrica se reproduisent également par voie végétative grâce respectivement aux stolons (Ahanchede, 1994), et aux rhizomes très résistants aux intempéries, et capables de ce fait d’assurer la survie de l’espèce même dans les conditions extrêmes (Vissoh et al., 2008). Mieux, C. benghalensis en plus des fleurs aériennes dont elle dispose pour sa reproduction, possède un système floral souterrain qui contribue à sa propagation rapide dans les agroécosystèmes (Ahanchede, 1994 ; Kaul et al., 2000). Tout cet arsenal biologique reproductif de propagation rend difficile l’éradication d’une telle espèce parce qu’il faut s’attaquer à la fois à la partie aérienne et celle souterraine de la plante. Par ailleurs, les plantes invasives se reproduisant par voie végétative sont plus persistantes dans les environnements agricoles, à cause de la résistance de leurs organes végétatifs, comparativement à celles à reproduction sexuée (Bello et al., 2019). La capacité de certaines espèces végétales à produire de grand nombre de graines, et la taille de ces dernières sont des facteurs très déterminants dans la propagation des plantes envahissantes. On retrouve dans cette catégorie de plantes, Rhamphicarpa fistulosa (Horchst) Benth, qui est une adventice à fruits déhiscents et qui constitue une sérieuse préoccupation dans les rizières en Afrique Sub-Saharienne (Zossou et al., 2013). La déhiscence des fruits de cette adventice, la taille microscopique de ses graines qui s’estiment à des centaines de milliers par m2 de sol infesté, ainsi que leur dormance innée contribuent à sa dissémination rapide dans les rizières du Centre et du Nord Bénin (Rodenburg et al., 2011). Etant une plante hémiparasite facultative du riz, elle arrive à persister même en absence de culture hôte et à se développer donc dans les zones humides et semi-humides en dehors des champs de riz en attendant éventuellement son hôte (Kabiri et al., 2016).

Le patrimoine génétique des plantes invasives favorise une forte différentiation génotypique qui entraine l’adaptation à de nombreux habitats hors de leurs aires de répartition d’origine. Ahanchedeet Gasquez (1995a) ont reporté que C. benghalensis présente une différenciation génotypique géographique au Bénin avec l’existence de deux écotypes qui n’ont d’ailleurs aucune ressemblance du point de vue de la morphologie, de la production de biomasse et de semences. Cette différentiation génotypique est perçue comme une adaptation écologique puisque la plante aurait été d’abord introduite dans une région du pays avant de se propager vers l’ensemble du territoire, et de développer alors un autre écotype en raison des conditions environnementales comme c’est le cas de la plupart des plantes invasives (Wang et al., 2020). Dans ce registre de différentiation génétique comme facteur d’invasion, il faut noter que dans la population béninoise de R. fistulosa, il y a des groupes génétiques (ou groupe d’accessions ou souches génétiques) qui sont génétiquement différenciés de ceux rencontrés dans la sous-région ouest africaine, avec une grande différentiation génétique entre les zones agroécologiques du Bénin (Zossou et al., 2016). Ces variations génétiques qui font partie des mécanismes de survie et de propagation des plantes invasives, constituent des sources de résistance aux herbicides et sont aussi de grands obstacles à la mise au point des méthodes de gestion durable des mauvaises herbes.

L’allélopathie est un phénomène d’interférence entre les plantes par le biais de molécules chimiques rencontrées chez la plupart des espèces exotiques envahissantes (Kalisz et al., 2021). Même s’il n’y a pas encore eu des études approfondies sur l’importance de ce phénomène dans les invasions biologiques au Bénin, des études réalisées sous d’autres angles ont permis de prouver le potentiel allélopathique de certaines plantes invasives de grande importance (Dandjlessa et al., 2019). On ne saurait alors dissocier l’allélopathie des facteurs permettant aux plantes invasives de s’établir dans des habitats des écosystèmes du Bénin et face à la compétition des espèces autochtones. Cela est d’autant plus probable que la plupart des études réalisées ailleurs sur les plantes invasives citent l’allélopathie comme un facteur clé du succès des invasions végétales (Estrada et Flory, 2015).

Tous ces caractères intrinsèques aux plantes invasives leur confèrent une écologie plastique favorisant leur distribution et leur établissement rapides dans de nouveaux écosystèmes.

Facteurs extrinsèques de propagation des plantes exotiques envahissantes

Les facteurs externes favorables aux invasions biologiques végétales sont de deux ordres à savoir ceux d’origine anthropique et les conditions environnementales favorables.

Facteurs d’origine anthropique

Les facteurs externes qui concourent au développement des plantes invasives sont nombreux et diversifiés même si certains restent communs à elles toutes. L’ouverture de nouveaux espaces agricoles s’accompagne des invasions de plantes indésirables, et l’âge d’exploitation continue des parcelles de cultures est un facteur clé d’invasion par les mauvaises herbes surtout C. benghalensis (Ahanchede, 1994). En effet, C. benghalensis se développe mieux dans les écosystèmes agricoles de longue date que dans les nouvelles exploitations (Ahanchede et Gasquez, 1995b). Cette mauvaise herbe ne supporte pas les jachères de longue durée et disparait donc des espaces agricoles non cultivés durant environ deux années de suite (Fournier et al., 2001). Par contre, d’autres espèces de plante exotique envahissante se développent mieux dans les jachères que sur les terres cultivées. Aboh et al. (2008), ont rapporté que Chromolaena odorata (L.) R. M. King & H. Rob. et Hyptis suaveolens L. Poit, envahissent plus les systèmes de jachère que les terres agricoles régulièrement cultivées, mettant ainsi en exergue un lien entre les systèmes de culture et le niveau d’infestation des exploitations agricoles par les plantes invasives.

Les activités agricoles mal exécutées ne sont pas du reste des facteurs qui concourent à la colonisation des espaces agricoles par les plantes invasives. D’abord, elles occasionnent la distribution des organes de reproduction des plantes à travers les exploitations agricoles. Les stolons, rhizomes, propagules et tiges des plantes à reproduction végétative, fragmentés lors des labours et désherbages par les matériels agricoles, favorisent la repousse rapide des mauvaises herbes et sur une aire plus accrue (Bello et al., 2019). Pire, lorsque ces matériels infestés sont utilisés dans d’autres espaces agricoles, ils sont sources de contamination par les organes de plantes qu’ils disséminent. Ensuite, les activités agricoles mal exécutées modifient l’intégrité des exploitations agricoles les rendant plus enclins aux invasions par les mauvaises herbes. C’est le cas des fertilisations minérales non raisonnées, qui selon Bello et al. (2012), favorisent l’enherbement rapide des exploitations agricoles au détriment des cultures.

Les échanges commerciaux sont eux aussi un très important facteur de propagation des plantes invasives. Rodenburg et al. (2015) ont rapporté que les graines minuscules de plante, comme R. fistulosa, adhèrent facilement aux semences de culture récoltées. Ces semences impures commercialisées et utilisées dans des champs non encore infestés auparavant conduisent à la dissémination de la plante invasive dans ce champ. Les eaux de ruissellement et la transhumance sont autant d’autres facteurs qui assurent la propagation des mauvaises herbes dans les espaces agricoles au Bénin et en Afrique Sub-Saharienne (Rodenburg et al., 2015).

Importance des conditions environnementales dans les invasions biologiques

Les conditions environnementales sont un préalable au développement des plantes exotiques envahissantes dans tout nouvel habitat. La température, la pluviométrie et le sol sont des éléments clés qui entrent en compte dans les invasions biologiques végétales.

Le changement climatique influence à cet effet les espèces invasives dans les agroécosystèmes et dans les végétations naturelles. Fandohan et al. (2015a) ont montré dans une étude sur la vulnérabilité des aires protégées aux plantes invasives et à l’aide des modèles de prédiction, que certaines plantes exotiques envahissantes auront une aire de répartition bien plus grande par rapport à leurs distributions actuelles. En effet, la propagation de Lantana camara L., une plante invasive présente au Bénin, semble être favorisée par le changement climatique notamment les variations de la pluviométrie et de la température. Le réchauffement climatique couplé avec les fortes averses tropicales contribue à la dégradation accélérée des terres qui modifie les propriétés physiques et chimiques de ces dernières (Igue et al., 2013). Ces changements environnementaux constituent des facteurs d’invasion par les plantes exotiques parce qu’il y a une forte relation entre le type de sol (texture, structure et composition chimique) et le degré d’infestation des agroécosystèmes par les plantes invasives notamment C. odorata et H. suaveolens (Ganglo, 2005 ; Aboh et al., 2008). Cependant, la température et la pluviométrie sont les deux variables environnementales les plus importantes qui déterminent la vulnérabilité d’un écosystème à l’invasion des plantes exotiques. C’est pour cette raison qu’elles sont d’ailleurs les plus utilisées, et parfois même les seules, dans la modélisation de la distribution potentielle des plantes invasives (Fandohan et al., 2015b ; Zossou, 2016).

Implication pour la prévention et une gestion durable des mauvaises herbes en agriculture

La maitrise des facteurs d’ordre naturel qu’anthropogénique de dissémination des plantes invasives, pourrait contribuer à freiner la distribution des mauvaises herbes et aussi à mieux les gérer dans les écosystèmes déjà infestés. La prédiction de la distribution potentielle des plantes invasives sous différents scenarios climatiques actuels et futures est un moyen de détermination de la vulnérabilité des écosystèmes à l’invasion biologique (Fandohan et al., 2015b ; Zossou, 2016). Cela permet de délimiter les zones potentiellement vulnérables et de prendre les mesures appropriées quitte à prévenir l’introduction de l’espèce ou à circonscrire sa distribution dans les zones déjà envahies.

L’utilisation de semences saines vis-à-vis des graines de mauvaises herbes est un facteur de frein à la propagation des plantes envahissantes dans les milieux agricoles (Rodenburg et al., 2015). Le développement d’un système semencier performant est alors une nécessité dans la prévention des résurgences des mauvaises herbes dans les exploitations agricoles. En outre, la réalisation des désherbages à bonnes dates va empêcher les mauvaises herbes de boucler leurs cycles, et donc de produire des graines qui sont sources de nuisibilité potentielle dans les champs.

L’utilisation abusive des engrais minéraux surtout azotés étant un facteur de risque de pression des mauvaises herbes, la fertilisation raisonnée et la gestion intégrée de la fertilité des sols pourront aider à la gestion durable de ces nuisibles. Les amendements organiques et le paillage surtout utilisant les résidus de plante à propriété allélopathique, sont des pratiques qui tout en renforçant la fertilité des sols, contribuent à réduire la pression des mauvaises herbes sur les cultures (Rugare et al., 2019). Les associations et rotations de cultures sont des pratiques culturales qui contribuent à freiner la dynamique des nuisibles en agriculture, et donc pourraient être d’une grande importance dans la gestion des adventices de culture (Liebman et Dyck, 1993). En effet, pendant que la diversification des cultures dans l’espace permet de réduire la densité des mauvaises herbes (Weerarathne et al., 2017) ; l’alternance de cultures entraine la baisse significative de la richesse spécifique des mauvaises herbes, diminuant ainsi le niveau d’infestation des exploitations (Satorre et al., 2020).

Conclusion

Les plantes invasives sont un problème crucial pour les écosystèmes agricoles au Bénin et en Afrique Sub-Saharienne. Elles occasionnent de nombreux dommages allant des pertes de rendement à l’inaptitude temporaire des terres à l’agriculture, due à leur nuisibilité potentielle du fait du stock semencier des sols infestés. Différents facteurs, aussi bien intrinsèques qu’extrinsèques aux végétaux invasifs, favorisent leur invasion et leur développement dans les agroécosystèmes ouest africains notamment béninois. Au nombre de ces facteurs se trouvent la biologie des plantes, la nature du sol et le changement climatique et les activités humaines. De ce fait, des améliorations dans les systèmes de production couplées avec des modèles de prédiction d’infestation liés au changement climatique et intégrant d’autres éléments de l’environnement, pourraient aider à limiter les chocs de résurgence dus à l’invasion de ces plantes dans les systèmes agricoles au Bénin et en Afrique Sub-Saharienne.

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