Résumé

Le présent article relate les travaux réalisés sur l’aviculture traditionnelle ou fermière au Maroc, en abordant les multiples importances socio-économiques, alimentaires, culturelles, et écologiques des systèmes de production de volaille à petite échelle,  dans la lutte contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire des populations rurales vulnérables. Après avoir traité les caractéristiques phénotypiques des populations de poulet existantes et leurs performances zootechniques, ce travail décrit les différents aspects du système d’élevage, identifie les principales contraintes qui freinent le développement de cette activité et met un accent particulier sur les dominantes pathologiques du poulet beldi.


 Mots-clés: Aviculture traditionnelle, poulet beldi, dominantes pathologiques, Maroc

INTRODUCTION

Au Maroc, la production avicole est assurée par deux secteurs d’importance inégale, le secteur industriel et le secteur traditionnel (El houadfi, 1992). Le secteur traditionnel, représenté essentiellement par l’élevage de poulet beldi, est un élément intégré dans la majorité des activités pratiquées au niveau des fermes rurales et périurbaines. En effet, il présente un grand intérêt en tant que source de revenus et d'emplois d’une part et comme source de protéines d'origine animale pour les populations des zones rurales d’autre part. Cependant, ce secteur est souvent négligé devant les autres activités agricoles en raison de son faible impact sur la trésorerie des ménages. A titre d’exemple, sur le plan sanitaire, aucun intérêt n’est accordé au poulet beldi pour la lutte contre les maladies infectieuses. La négligence de cette aviculture est relevée également sur le plan génétique avec l’absence de programmes de préservation des ressources génétiques locales. Le but de cette synthèse bibliographique est d’établir un état des lieux sur l’aviculture traditionnelle au Maroc, en particulier les caractéristiques des différents systèmes et les pratiques alimentaires dans ce sous-secteur avicole. Les caractéristiques phénotypiques et les performances zootechniques des poulets traditionnels ainsi que les diverses contraintes auxquelles est confrontée cette aviculture notamment les dominantes pathologiques seront abordées et discutée dans ce travail.

IMPORTANCE DE L’AVICULTURE TRADITIONNELLE AU MAROC

Importance socio-économique

En dépit du développement remarquable de l’aviculture industrielle durant ces trois dernières décennies, l’aviculture traditionnelle reste très répandue en milieu villageois. Au Maroc, 50.000 tonnes de viandes blanches et 800 millions d’œufs produits proviendraient des élevages traditionnels (FISA, 2019). Malgré la baisse de la proportion du cheptel de l’aviculture traditionnelle au fil des années, celle-ci est restée incontournable dans la formation du revenu des ménages ruraux. La vente des œufs peut procurer un revenu régulier, quoique faible alors que la vente de poulet vivants procure un compte courant pour les populations et leur permet de satisfaire une part de leurs besoins financiers. A titre d’exemple, dans la région de Khénifra, les prix de vente oscillent entre 50 et 70 Dhs/unité pour les coqs et entre 35 et 50 Dhs pour les poules (Arfaoui, 2000; Karari, 2001; Bouhalba, 2002). Le revenu généré par la pratique de l’élevage du poulet beldi est principalement utilisé pour le paiement des frais scolaires et médicaux, l’achat de vêtements et autres besoins.

Par ailleurs, étant une activité féminine par excellence, l’aviculture traditionnelle permet de renforcer le rôle socioéconomique de la femme au sein de la famille en particulier et de la société en général. C’est donc une activité qui contribue à l’atténuation des disparités de genre en milieu rural.

Figure 1: La vente des volailles et des oeufs constitue un appoint pour la trésorerie de l’exploitation (Karari, 2001)

Importance nutritionnelle

L'aviculture constitue la branche d'élevage la plus sollicitée pour faire face aux déficits protéiques et pour améliorer l'état nutritionnel des populations. Par conséquent, les produits avicoles (viande et œufs) constituent une source nutritionnelle facile et disponible en raison du court cycle de production par rapport aux autres espèces (Khribch, 2013). En milieu rural, plus des 2/3 des viandes de volailles élevées sont destinés à l’autoconsommation, ce qui reflète le rôle important des élevages de basse-cour dans l’amélioration de l’état nutritionnel de cette population protéique à cette population (Barkok, 2008).

Importance culturelle

L’aviculture traditionnelle jouit d’une importance culturelle particulière par rapport aux autres élevages. La viande qui en provient est appréciée grâce à sa flaveur et sa convenance aux plats traditionnels. Le poulet "beldi" a une importance symbolique lors de nombreuses cérémonies sociales et religieuses: arrivée des invités, Ramadan, Achoura… (Belkadi, 1968). En outre, les volailles sont offertes comme cadeau pour les amis et les proches lors des visites familiales

Importance écologique

Sur le plan environnemental, l’élevage traditionnel de la volaille n’a aucune incidence négative sur l’environnement. Bien au contraire, lors de leur divagation, les animaux contribuent efficacement à l’éradication des insectes et des plantes nuisibles et ils participent aussi au travail superficiel du sol et à son amendement (Ries, 1988).

CARACTERISTIQUES PHENOTYPIQUES ET PERFORMANCES DE REPRODUCTION ET DE PRODUCTION DU POULET BELDI AU MAROC

Caractéristiques phénotypiques

Malheureusement, il n’existe pas des souches de poules autochtones marocaines, on trouve une population de poules locales communément appelées «beldi» à phénotypes très variés, issue de croisements incontrôlés entre différentes souches aussi bien locales qu’étrangères, et ce, depuis 1920, date de création de la première station avicole de Meknès et l'introduction de races améliorées. Par conséquent, cette population est un métissage entre plusieurs souches (Belkadi, 1968 et Agenor, 1973, Barkok, 2008). Les caractéristiques phénotypiques de cette population sont très diversifiées. La couleur de leur plumage est variable et hétérogène. Par ailleurs, les couleurs noires, brunes, grises, et blanches, simples ou combinées, sont les plus répandues. L’emplumement est régulier avec toutefois des particularités, à savoir des tarses plumés et des cous nus ou huppés ont été rapportés au Moyen Atlas. Les formes des crêtes sont très diversifiées aussi bien chez les mâles que les femelles. Au total, quatre types des crêtes ont été observés: lobés, striés, simples et à feuilles, avec une prédominance des formes simples chez les femelles et striées chez les mâles. Les pieds présentaient une diversité de couleurs variant du jaune clair au noir (Arfaoui, 2000).

Figure 2: Différentes formes de crêtes (Oukessou M., 2004)

Performances de reproduction et de production du poulet beldi au Maroc

Le faible potentiel génétique et les conditions d’élevage difficiles, constituent les principales causes des contre-performances en l’aviculture traditionnelle (Arfaoui, 2000). En revanche, et contrairement au poulet industriel, le poulet beldi est rustique et bien adapté aux conditions locales. En outre, les poules beldi sont reconnues comme étant de bonnes couveuses et de bonnes mères (Agenor, 1973). Ainsi, les performances de reproduction obtenues chez le poulet beldi sont variables suivant les conditions d’élevage, la saison et la région.

Ponte

En milieu villageois, l’âge d’entrée en ponte de la poule varie selon plusieurs auteurs,

il est de 6 à 9 mois selon Baba et al. (1991), entre 5,5 et 6,75 mois (El Houadfi, 1992), 5,8 mois (Arfaoui, 2000), 7,6 mois selon Karari (2001), et de 7,5 et 8 mois selon Bouhalba (2002). La ponte est cyclique et s’étale sur une période d’environ un mois, entre 23 et 33 jours (Agenor, 1973 ; Karari, 2001; Bouhalba, 2002), puis la poule est prise par l’instinct de couvaison. Espérant allonger le cycle de ponte, certains éleveurs essayent de prévenir cette manifestation physiologique par le trempage de la poule dans l’eau froide ou en mettant des plumes dans ses narines (Bouhalba, 2002). Les poules locales ont une production annuelle très variable, elle est de 60 à 80 œufs selon (El Houadfi, 1992), de 78 œufs (Arafoui, 2000), de 73 œufs (Karari, 2001) et de 84 œufs selon Bouhalba, (2002). Le travail réalisé par El Houadfi en 1992 a rapporté que les œufs pèsent en moyenne 35 à 50 g , ce qui est proche de la valeur de 53g rapportée par Karari (2001). Les poules locales effectuent les pontes dans des endroits différents selon leurs habitudes: dans les écuries, les mangeoires du bétail, sous la réserve de la paille et dans les buissons (El Houadfi, 1992).La plupart des œufs sont ainsi perdus et la fermière n'en récupère qu’une faible partie (Belkadi, 1968).

• Couvaison-éclosion

La couvaison est pratiquée en moyenne deux fois par an, pendant l’automne et le printemps. Mais les fermières préfèrent le plus souvent celle du printemps en raison des disponibilités alimentaires. La couvaison se fait dans un endroit isolé et calme pour éviter le dérangement de la poule (Thiennel, 1989).

Le choix de la future couveuse prend en considération plusieurs éléments parmi lesquels la taille de la poule et les expériences des années précédentes. En effet, la poule ayant réalisé les meilleurs taux d’éclosion et protégeant bien ses poussins est celle que l'on retient pour la couvaison (Karari, 2001).

Quant au choix des œufs à couver, plusieurs critères de sélection sont retenus. Avec un sex- ratio d’en moyenne de 0,2 pour la poule, les éleveuses ne se soucient pas de la fertilité des œufs (Belkadi, 1968). Par contre, elles prêtent une attention particulière à la taille des œufs car, selon elles, Il s’agit d’un caractère déterminant de la vigueur du prochain poussin (FAO et MARA, 1966). La taille de couvée varie de 12 à 20 œufs (El Houadfi, 1992, Karari 2001).Les taux d’éclosion réalisés sont de l’ordre de 76 %, cependant des pourcentages plus bas de l’ordre de 50 % ont été également enregistrés (Arfaoui, 2000). Karari en 2001 a enregistré un taux d’éclosion de 63 % en printemps et 53 % en été. En effet, la diminution du taux d’éclosion entre les saisons est attribuée essentiellement aux fortes chaleurs qui occasionnent la pourriture des œufs. Les principales causes déclarées de l'échec d'éclosion sont l'infertilité des œufs, la mortalité embryonnaire et les accidents.

Après l’éclosion et pendant les 12 premiers jours, les poussins sont retenus avec leurs mères dans une caisse en bois ou en carton ou dans la cour de la maison. On leur distribue une alimentation différente du reste du troupeau (généralement à base semoule de granulométrie assez fine). Après ces jours de privilège, les jeunes oiseaux sont libérés pour qu’ils apprennent, sous la protection de leur mère, à picorer dans la nature. Cette période constitue une étape de transition avant la séparation de leur mère au début de la prochaine saison de ponte. Cette phase constitue l’étape cruciale dans la vie d’un poulet beldi. En effet, une grande partie des jeunes disparaissent avant l’âge de 2 mois. Les causes principales en sont les maladies (60 % des cas), les prédateurs (30 %) et des accidents (7 %) (Karari, 2001; Bouhalba, 2002).

Figure 3: Poule avec sa couvée (Oukessou M., 2008)

• Croissance

Les poids enregistrés par divers auteurs chez le poulet beldi élevé en milieu rural sont consignés dans le tableau 1. De façon générale, la croissance est très lente chez le poulet beldi par rapport aux souches industrielles. Le suivi des performances du poulet local, dans des conditions contrôlées, a montré que le poids commercial (1,7 kg) est atteint à l'âge de 21 semaines (contre environ 6 semaines chez les souches industrielles). De même pour produire 1 kg de viande, le poulet beldi doit recevoir 5,3 kg d'aliment complet contenant 3,6 kg de graines alors qu'un poulet industriel n'en réclame que 2,2 kg dont 1,4 kg sont de graines (FAO et MARA, 1966).

Tableau 1.Poids du poulet beldi à l’âge adulte au Maroc

CONDUITE DE L’ELEVAGE TRADITIONNEL DE POULET BELDI

• La taille des troupeaux

La taille des troupeaux de poulets beldi exploités dépend généralement de l’objectif de l’élevage (autoconsommation ou commercialisation), de la saison, de la situation économique et nutritionnelle et l'occurrence des maladies décimant les troupeaux. Elle varie entre 2 et 40 (El Houadfi, 1992), 1 à 38 (Arfaoui, 2000), 1 à 28 (Karari, 2001) et 5 à 23 (Bouhalba, 2002). La possession d'un nombre réduit de poules constitue la caractéristique commune entre les différents élevages. Ainsi 80 % des foyers possèdent moins de 6 poules (FAO et MARA, 1966).

• Habitat

Les abris réservés à la volaille restent rudimentaires, voire inexistants (Agenor, 1973; Arfaoui, 2000). Les roseaux, les pierres, le pisé, arbres et le plastique constituent les principaux éléments utilisés pour leur construction (Akil, 1971; Karari, 2001). Leur conception est simple en terre battue ou en pierres recouvertes de chaumes ou de branches d’arbres et comportait pour toute ouverture une porte fermant à l’aide d’un battant en bois. Le sol n'est ni cimenté, ni même recouvert de litière (El Omari, 1999; Arfaoui, 2000). Ledit poulailler n’est qu’un abri pour la nuit et pour se protéger contre les intempéries et les prédateurs (Akil, 1971; Tmiri, 2000). On y renferme toute la volaille quand elle existe (Ries, 1988); le jour venu on les libère afin qu’elles puissent aller là où elles veulent à la recherche de leur nourriture (Belkadi, 1968). Des résultats similaires ont été obtenus en Ethiopie où 88,5 % des cas les poulets étaient sans habitats et élevés en divagation, les autres disposants de poulaillers rudimentaires et inadaptés, leur servant d’abris, notamment pendant la nuit. En général, les poulaillers qui sont censés protéger les oiseaux contre les intempéries et les prédateurs, lorsqu’ils existent dans le ménage rural, sont pour la plupart rudimentaires et construits en matériaux de fortune (vieux tonneaux, murs de terre battue, ou briques de récupération, bois ou bambous couverts de paille ou de vieilles tôles), mal ou non aérés et souvent à microbisme élevé car difficiles d’accès au nettoyage (Tadelle et Ogle, 2001 ; Fotsa et al., 2007).

• Alimentation

Les études réalisées dans la région de Khénifra et ailleurs montrent que dans le système d’élevage avicole traditionnel, les poulets sont laissés en divagation se nourrissent de mauvaises herbes, insectes et résidus de récolte présents dans leur environnement immédiat. Ils sont ainsi dépendants de leur système écologique du fait que la disponibilité de leur nourriture soit liée à la saison. Lorsque l’environnement est riche en débris alimentaires divers, les aliments dont disposent les poulets leur apportent une variété de nutriments qui parfois, leur assurent un régime presque équilibré, mais de façon générale, l’alimentation des poulets traditionnels à travers la divagation est insuffisante, voire même absente dans certaines conditions (Karari, 2001).

A côté des aliments prélevés par la fouille, les poulets reçoivent une complémentation dont la quantité et le type dépendent du rendement de la récolte et de la saison. En effet l’orge, le son, le blé dur, le maïs, les criblures de blé, le pain sec et les épluchures de légumes sont les principaux aliments supplémentés. Tous ces produits sont essentiellement produits à la ferme. Les aliments distribués deux à trois fois par jour sont servis au sol ou sur des ustensiles usés, alors que les mangeoires sont réservées aux adultes. Les céréales sont apportées sous forme de grains entiers (orge et blé dur), moulues (maïs) ou trempées dans de l'eau (son de blé) et parfois mélangées (son de blé, pain sec et maïs). La séparation des oiseaux selon les groupes d'âge au moment de la distribution est très rare. Selon Arfaoui, (2000) dans près de 94% des foyers, l'eau est distribuée aux volailles. Selon le même auteur, l’'eau fournie provenait d'un puits (61%) et/ou de sources naturelles trouvées dans la communauté (39%). Pendant les périodes pluvieuses, les ruisseaux, les flaques d’eau boueuses et les marres stagnantes constituent les principales sources d'abreuvement des volailles (Belkadi, 1968 ; Akil, 1971).

Figure 4: Poulets divagant dans la nature pour chercher la nourriture (Oukessou M., 2008)

CONTRAINTES AU DEVELOPPEMENT DE L’ELEVAGE DE POULET BELDI

Le faible niveau d'intrants économiques, l'absence d'une alimentation adéquate, le manque de contrôle sanitaire, la fréquence des maladies, la faible technicité (Thiennel, 1989), le manque de suivi de la production et de la reproduction (El Houadfi, 1992) et l'utilisation d'animaux au potentiel génétique inconnu (Agenor, 1973) sont les principales contraintes au développement de l'aviculture traditionnelle. Ces contraintes sont aggravées par l’infertilité des œufs (50%), la mortalité élevée des poussins à l'éclosion, le manque d’abris convenable et l’absence de programme de lutter contre les maladies infectieuses et parasitaires.

• L’habitat

Les logements rudimentaires ou inexistants exposent les animaux aux sévères conditions climatiques et aux prédateurs. Ce qui occasionne des pertes énormes en œufs, en poussins et en oiseaux adultes.

• La sous-alimentation

L’alimentation basée essentiellement sur la cueillette avec une complémentation sommaire ne convient pas à la satisfaction des besoins de la volaille. La sous-alimentation résultante entraîne des retards de croissance, des maladies carentielles et prédispose les animaux à plus de sensibilité aux agents pathogènes (Belkadi, 1968).

• Les contraintes sanitaires

Au niveau des élevages traditionnels, les maladies constituent la principale cause de décimation des troupeaux. Ainsi, Arfaoui (2000) rapporte qu'elles occasionnent 98 % des mortalités chez les poules. La principale entité pathologique demeure la maladie de Newcastle rapportée chez tous les éleveurs dans la région de Sidi Bettache et Khémisset (Tmiri, 2000). D'autres maladies sont aussi répandues dans les élevages avicoles traditionnels au Maroc comme la variole, le choléra aviaire, la typhose aviaire et les parasites aussi bien internes qu'externes (El Houadfi, 1992). Les parasites externes et les plus redoutés chez le poulet beldi sont essentiellement représentés par le pou rouge (Dermanyssus gallinae).

DOMINANTES PATHOLOGIQUES

Les taux de mortalité élevés observés au niveau des élevages avicoles fermiers engendrent des pertes économiques lourdes, surtout dans les pays en voie de développement où la production avicole traditionnelle constitue une source importante de revenus. Ces mortalités sont principalement dues aux maladies et secondairement aux prédateurs (Arfaoui et al., 2000).

Comme il a été évoqué, la pseudopeste aviaire ou la maladie de Newcastle est l’entité pathologique la plus meurtrière de la volaille traditionnelle au Maroc. En effet, l’apparition de la maladie dans un village peut causer la disparition presque totale de la volaille de ce dernier.

La propagation de la maladie entre les élevages du village est très rapide du fait du contact permanent et étroit entre l’ensemble de la volaille du village.

• La maladie de Newcastle

Au Maroc, la maladie de Newcastle porte plusieurs appellations selon les régions : Bouchninik dans la région de Khémisset et Sidi Battach (Elomari, 1999), Bourich dans la région de Khénifra (Atifi, 2001), Rih dans la région d’Oulmès et Borrch dans la région d’El Haouz (référence). En 1987, Mouloudi a étudié l’incidence la maladie de Newcastle chez le poulet fermier dans six régions au Maroc (Rabat, Larache, Oujda, Taza, Beni-Mellal et Marrakech). Les résultats de l’enquête ont révélé des mortalités très élevées pouvant atteindre 100%. Les lésions observées à l’autopsie sont évocatrices de cette maladie. Tous les prélèvements du sang effectués étaient séropositifs ce qui témoigne d’une infection naturelle puisque le poulet fermier ne reçoit pas de vaccins. Le travail de Mouloudi (1978) a conclu que le virus de la maladie de Newcastle était largement répandu chez le poulet beldi dans les régions étudiées. El Omari (1999) a étudié la prévalence et l’impact de la maladie de Newcastle chez le poulet fermier dans deux zones au Maroc (Sidi Bettache et Khémisset- Moulay Bouaaza). Il a obtenu des taux de séropositivité compris entre 17% et 67% selon les douars et la zone. Par la suite, Tmiri (2000) a montré que la maladie de Newcastle est déclarée dans 100 % des exploitations visitées dans les régions de Sidi Bettache et Tiflet. Elle est observée chez tous les groupes d’âges des oiseaux. Les symptômes relevés sont : la diarrhée verdâtre, le torticolis, la paralysie des membres, l’abattement puis la mort dans quelques jours qui suivent l’apparition des symptômes. Les taux de mortalité déclarés peuvent atteindre 100%. Sur le plan lésionnel, il a noté une péricardite, une bronchite et une trachéite ce qui évoque la maladie de Newcastle probablement associée à la bronchite infectieuse. Atifi (2001) et Khribch (2013) ont rapporté des taux de séropositivité respectivement de 55% dans la région de Khénifra et 57,26% dans la région d’Ait Ichou à Oulmès. Ces résultats ont montré également que le poulet «Beldi» joue un rôle de réservoir du virus et, constitue par conséquent, une menace permanente de contagion pour le poulet industriel en maintenant une pression virale constante.

• Maladie de Gumboro

Kichou et al. (1999) ont rapporté une séropositivité de 86% pour le virus de la maladie de Gumboro comparée a, uniquement, 25% des sérums testés (test d’inhibition de l’hémagglitunation) étaient positifs pour le virus de la maladie de Newcastle. Cependant l’étude réalisée par Tmiri (2000), basée sur l’enquête et sur l’histopathologie n’a révélé aucun cas de la maladie de Gumboro dans les régions de Sidi Bettache et Tiflet. Dans la région de Khénifra, l’étude réalisée par Atifi (2001), basée sur une enquête sérologique, a rapporté que la maladie de Gumboro présente un pourcentage de séropositivité (ELISA) variait de 83% à 93%. En l’absence de vaccination, il a conclu que le virus de la maladie de la maladie de Gumboro sévit largement dans la région de Khénifra.

• La bronchite infectieuse aviaire

Une seule étude réalisée par dans la région de Khénifra par Atifi (2001) a rapporté une séropositivité à l’ELISA allant de 58% à 100% selon les élevages.

• Les Salmonelloses

L’étude menée par Bouzoubaa et al. (1992) sur l’élevage fermier de deux régions du Maroc Khemis zemamraet Marrakech, a montré une séroprévalence de la typhose et la pullorose de 7,6 % et 4,4 % et un taux d’isolement global de 6 et 10 % respectivement dans les deux régions. Dans la région de Khénifra, Atifi (2001) a rapporté un taux d’isolement global de 5.6%, ainsi que les souches isolées et identifiées sont des salmonelles mobiles et le sérotypage a permis d’identifier Salmonella enteritidis du groupe D. Ces études ont conclus que le poulet villageois constitue un réservoir de Salmonella gallinarum et Salmonella pullorum menaçant continuellement le secteur industriel (Bouzoubaa et al., 1992; Atifi, 2001).

• Les Mycoplasmoses

L’étude menée par Atifi en 2001 en utilisant la séroagglutination rapide sur lame a permis de noter une séropositivité de 27% à 37% pour Mycoplasma gallisepticum et de 3% à 17% pour Mycoplasma synovie.

• Les Maladies parasitaires

Les parasites internes et externes sont largement répandus dans les élevages traditionnels au Maroc (Dakkak et El Houadfi, 1992; Kichou, 2002). Une étude menée par Dakkak et El Houadfi (1992) dans les élevages traditionnels dans la région de Moulay Bousslham et la région de Roummani en utilisant des autopsies et l'identification des parasites, a rapporté que les parasites internes les plus dominants dans la région ont été Ascaridia galli, Heterakis gallinarum, Raillietina cesticillus, Davainea proglottina. El Omari (1999) et Tmiri (2000) ont rapporté les mêmes parasites dans la région de Khémisset. Dans la région de Khénifra, Atifi (2001) a rapporté une infestation de 71,42% par Heterakis gallinarum, 28,57% par Ascaridia galli et Railletina sp. L’infestation par les ectoparasites a compris les tiques (Argas spp et Rhipecephalus spp.), les acariens (Ornythonyssus bursa) et les puces (Echidnophaga gallinacea) a été également reportée surtout en période chaude. Ces résultats confirment l’aspect endémique des parasites dans les élevages avicoles traditionnels au Maroc.

CONCLUSION

Cette étude bibliographique montre que l’élevage de poulet beldi au Maroc, joue un rôle socio-économique et nutritionnel indéniable. Il représente un moyen viable pour la lutte contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire des populations rurales. L’élevage traditionnel de poulet beldi est essentiellement une activité féminine et pourrait représenter un soutien à la promotion de la femme rurale. Cette activité présente la particularité d'un cycle de production très court et nécessite des investissements minimes. Toutefois, malgré son importance nutritionnelle, socioculturelle et économique, son essor reste encore limité par diverses contraintes dont plus particulièrement celles ayant trait aux pathologies infectieuses et parasitaires et à l’absence de programme de sélection génétique. Sur le plan sanitaire, et contrairement aux idées préconçues, le poulet beldi est très réceptif et sensible à toutes les pathologies infectieuses décrites chez le poulet industriel et dont la maitrise est un pré-requis pour la durabilité de l’élevage. Sur le plan ressources génétiques, la négligence de cette richesse animale nationale a abouti au fil du temps à l’extinction des races autochtones suite à des croisements anarchiques entre diverses races dont celles importées de l’étranger. Dans un tel contexte à tout point de vue difficile, plusieurs actions doivent être entreprises. En amont une prise de conscience doit s’installer chez les décideurs et les autorités compétentes, afin d'assurer une couverture sanitaire des volailles et, de tirer parti au maximum de toutes les ressources alimentaires disponibles, en aval il faudra agir essentiellement sur la commercialisation par la mise au point de coopératives bien structurées.

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